dimanche 11 octobre 2020

9 Octobre 2018 : Fraude avérée dans les papiers de l'ancienne présidente du CNRS Anne Peyroche

Fraude avérée dans les papiers de l'ancienne présidente du CNRS Anne Peyroche

article original de Leonid Schneider traduit en français :

Le journal l'Express rapporte que l'Académie de Sciences a commandé un rapport d'enquête sur les papiers de l'ancienne présidente par intérim du CNRS Anne Peyroche, et que le CNRS et le ministère français de la Recherche ont tenté de le faire disparaître. Peyroche elle-même n'a pas pu être entendue, car elle est hospitalisée depuis le début de l'affaire. Ses co-auteurs en ont donc profité pour accuser Peyroche pour chaque fausse figure. Pendant ce temps, des données dupliquées ont même été trouvées dans l'article de la ministre de la Recherche, Frédérique Vidal.

Le scandale des fraudes dans la recherche en France prend un nouveau tournant. Le magazine l’Express rapporte (grâce à l’excellent travail de la journaliste Anne Jouan) que l’Académie des sciences française a commandé un rapport d’enquête sur les articles de l’ancienne présidente par intérim du CNRS Anne Peyroche et que le CNRS et le ministère français de la Recherche et de l’Education ont tenté de le supprimer. Le rapport, que le journal a rendu public, est très méticuleux et accablant pour déterminer qu'il y a eu fraude dans la recherche et appelle à la rétractation des articles de Peyroche. Sa seule limitation étant que Peyroche elle-même ne peut pas être entendue, car elle est hospitalisée depuis le début de l'affaire, qui a commencé avec mes messages sur PubPeer et ceux de certains experts en manipulation de l'image avec lesquels je travaille. Ses co-auteurs en ont donc profité pour nier toute connaissance et responsabilité et accuser Peyroche pour chaque fausse figure pour laquelle ils étaient appelés à répondre.

Le comité d'enquête de Peyroche a examiné toutes les preuves de PubPeer, demandé les données originales et trouvé encore plus de figures truquées. Il recommande 3 rétractations où les données ont été excessivement manipulées et va jusqu'à déclarer le découpage de gel non déclaré comme une forme de méconduite scientifique, bien que ce soit seulement le stade I ou II sur une échelle à 5 étapes, la plus élevée étant une invention pure et simple de données de recherche. Les enquêteurs indépendants ont cependant trouvé plusieurs exemples de niveau IV, de manipulation de données avec l'intention de tromper et de cacher et de déformer les vrais résultats scientifiques. Le plus gros scandale ici est que si les mêmes règles d'une enquête pour faute professionnelle étaient appliquées à l'autre haut fonctionnaire français de la bureaucratie du CNRS, la biologiste en chef Catherine Jessus, un retrait massif de ses papiers et un licenciement pour Jessus du service public serait la seule conséquence raisonnable.

Peyroche, à gauche, et Jessus, 3e à gauche (novembre 2017, source : CNRS)

Alors que Peyroche rencontrait (à juste titre) toute la force de l'intégrité de la recherche française, Jessus a reçu un traitement différent : un faux rapport de blanchiment rédigé par elle-même avec son ami et subordonné Francis-Andre Wollman, Poulet de la Légion de la Disgrâce et accessoirement également membre de l'Académie de Sciences (lire ici). Cet étron non signé qu’est ce rapport de l'Université de la Sorbonne a déclaré que les duplications de bandes de gel et d'autres fragments d'image étaient de bonnes pratiques de recherche, tout en acceptant l'absence de toutes les données de recherche originales pertinentes comme quelque chose de trivial et n’ayant aucune importance. Après que certains scientifiques français aient osé protester, plus de 500 de leurs pairs seniors, pour la plupart du CNRS (dont l'ancien président Alain Fuchs) et plusieurs membres de l'Académie de Sciences ont signé une lettre stalinienne en faveur de Jessus et de ses manipulations de données, tout en exigeant le limogeage de tous les traîtres et lanceurs d'alerte, en particulier le journaliste du Monde qui a osé rendre compte du scandale. Et alors que Peyroche fait (à juste titre) face à quelques rétractations, Jessus s'en est sortie avec quelques corrections très embarrassantes, car le Comité d'éthique de la publication (COPE) interdit de retirer des articles frauduleux sans autorisation des instituts de recherche, ici l’Université de la Sorbonne.

Peu de temps après, Jessus se baladait avec les grands politiciens, les hauts dirigeants du CNRS et des universités et le Prix Nobel Jules Hoffman.

Jessus fait la fête le 1er octobre 2018. De gauche à droite : Michel Deneken, président de l'Université de Strasbourg; François Werner, vice-président de la Région Grand Est; Catherine Jessus, Martyre et Ange de l’Innocence, Robert Herrmann, Président de l’Eurométropole de Strasbourg, Frédéric Bierry, Président du Conseil Départemental du Bas-Rhin; Jean-Luc Marx, préfet de la région alsace; Jules Hofmann, lauréat du prix Nobel 2011; Jean-Luc Imler, directeur de l'IBMC-CNRS Strasbourg

Si vous pensez que c'est grave et malsain, la situation est en réalité encore pire que cela. Le copier-coller de bandes de gel dont Jessus est responsable n'a jamais été retrouvé dans les papiers de Peyroche, et Peyroche était déjà accusé de fraude au deuxième degré en matière de recherche. Pourtant, c'est quelque chose dans quoi l'autre tristement célèbre tricheur français, le phytologue Olivier Voinnet, s'engage régulièrement. Incidemment, Jessus et ses collègues de l'institut CNRS de Strasbourg ont récemment absous Voinnet de tout soupçon de manipulation de données et blâmé son ancien bras droit, Patrice Dunoyer, qu'ils ont envoyé faire sa valise pour sa lointaine île natale de Nouvelle-Calédonie. L’employeur actuel de Voinnet, l’ETH suisse, s’est félicité de voir Voinnet largement innocenté et m’a annoncé qu’il n’y aurait plus d’enquête sur ses publications et qu’aucune preuve de méconduite ne pourra jamais être présentée contre lui à l’avenir.

Maintenant, Peyroche est à l'hôpital pendant que les élites scientifiques françaises préparent un procès-spectacle, avec elle étant désignée comme la plus grande fraudeuse de l'histoire française récente et sur le point d'être limogée par son employeur, le Commissariat à l'énergie atomique (CEA), qui a demandé le rapport d'enquête. Ce qui nous ramène à l’article de l’Express. Apparemment, Peyroche était sur le point d'être limogé, mais la ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Frédérique Vidal est intervenue. Comme mes sources l'ont indiqué avoir entendu, la même Vidal serait auparavant intervenue au nom de Jessus, ordonnant au CNRS de taire cette affaire. En outre, mes sources m'ont alerté sur cette duplication de gel intéressante dans un article de Vidal et al, J Cell Science 2011, l'auteur Vidal étant l'actuel ministre du gouvernement pour l’Enseignement Supérieur et la Recherche.

Même la ministre de la Recherche Frédérique Vidal.

D'après l'article de l'Express d'hier:

« Malgré la gravité de ces conclusions, les directions du CNRS et du CEA ont décidé d'enterrer le rapport de l'Académie des Sciences. Cette attitude suscite colère et incompréhension de certaines huiles des deux organismes mais aussi à l'Académie des Sciences, d'ordinaire très feutrée, sidérée que l'on ait pu s'asseoir sur un rapport portant des accusations de fraude aussi lourdes. Selon nos informations, Daniel Verwaerde, l'ancien administrateur général du CEA, commanditaire du rapport, avait décidé de mettre Anne Peyroche à la porte.

Mais son successeur, François Jacq, récipiendaire du travail des académiciens, n'a pas donné suite. Il faut ajouter que Frédérique Vidal, la ministre de la Recherche a tout fait pour protéger la chercheuse fautive. Ainsi lors d'une réunion au ministère tenue au printemps dernier, la ministre a expressément demandé à Daniel Verwaerde et Vincent Berger de suspendre les sanctions en cours, dont le licenciement prévu. »

Quelqu'un d’indigné a maintenant divulgué ce rapport de mai 2018 aux journalistes. La première question que je me pose est : pourquoi à l’Express, un journal qui n’a jamais beaucoup parlé de Voinnet, Jessus ou en fait l’affaire Peyroche ? Est-ce parce que les fuyards détestent autant Le Monde, pour leurs reportages sur tous ces sujets, et en particulier sur l'affaire Jessus ? Si cela est vrai, le fuyard pourrait être avec le CNRS ou plutôt même un membre de l'Académie des Sciences, peut-être même l'un des instigateurs de la lettre Stalinienne ? N'oublions pas que les enquêteurs eux-mêmes disent que le rapport n'est pas définitif, Peyroche n'étant pas encore en mesure de se défendre contre les accusations de ses coauteurs.

Les auteurs de la lettre stalinienne, en gras. Puis ~ 500 signataires ont suivi.

Le comité d'enquête était présidé par l'immunologiste clinique et membre de l'Académie des sciences Jean-François Bach, d'autres membres nommés étaient la chercheuse en neurosciences et épigénétique Valérie Lallemand, les neuroscientifiques et chercheur en signalisation moléculaire Joël Bockaert et le chercheur en génomique et cancer Jean-Marc Egly. Ils analysaient les articles de Peyroche sur le thème de la biochimie des levures, en particulier le repliement des protéines et le trafic intracellulaire.

Bach dans sa lettre de motivation à l'Académie des Sciences : « Permettez-moi de mentionner, selon l’usage, le volume de travail réalisé par les membres du comité : quatre-vingts heures par Valérie Lallemand et Joël Bockaert et cent vingt heures par Jean-Marc Egly ».

L'affaire Peyroche a commencé avec un article sur PubPeer, et a explosé lorsque certains experts en intégrité de la recherche que j'ai invités ont trouvé d'autres irrégularités (voir cet article). Mes propres messages ont été modérés par PubPeer (dont les deux principaux fondateurs sont des employés du CNRS), et ont été déclarés être des accusations calomnieuses fondées sur des « artefacts de compression » mal compris. Finalement, une campagne de représailles a commencé sur PubPeer m'accusant de méconduite dans la recherche et le vol de données, tandis qu'un message de PubPeer affirmait que j'avais harcelé Peyroche personnellement par téléphone et provoqué son hospitalisation.

Ce message peu recommandable (finalement supprimé) n'a été approuvé que 2 minutes après sa publication. Juste avant cela, je tweetais à propos de Cordyceps, sur une question sans aucun rapport avec cette affaire. Les commentateurs ne peuvent pas choisir leurs noms, ceux-ci sont attribués par PubPeer.

Il semble que les chercheurs de l'Académie des Sciences ne soient pas d'accord avec l'évaluation du lanceur d’alertes PubPeer selon laquelle il n'y avait rien d'autre que des « artefacts de compression ». Les experts ont trouvé beaucoup plus de manipulations de données que rapporté sur PubPeer, et ont déterminé une « faute scientifique » jusqu'au niveau IV, après avoir appliqué cette échelle pour leur analyse.

« Niveau I. L'embellissement est un terme souvent utilisé. Il regroupe en fait des fautes diverses et de gravité variable. Il inclut l’adjonction ou l’omission de parties de figures ou le choix excessif de figures dites représentatives alors qu'elles ne le sont pas.

Niveau II. La manipulation consiste à utiliser des données existantes mais en les présentant de façon à leur donner une visibilité qu'elles n'avaient pas originellement. Un exemple typique est de rassembler dans une figure des éléments issus d'expériences différentes en laissant croire qu'il s'agit de la même expérience.

Niveaux III et IV. La falsification consiste à modifier certains résultats, par exemple en retirant une bande dans un gel ou plus généralement en apportant des modifications significatives aux données brutes. Le masquage de résultats en positif ou négatif pour montrer la présence ou absence de certaines biomolécules dans des fractions protéiques est également une forme de falsification. Nous proposons de différencier la falsification de niveau III qui ne change pas l'interprétation d’une figure ou d’une phrase de texte et la falsification de niveau IV qui correspond à des falsifications qui modifient l'interprétation de la figure ou du texte, indépendamment du message scientifique global. L’OECD (Consensus Report on Scientific Integrity Falsification), caractérise la falsification de manière similaire: “Falsification is manipulating research, materials, equipment, or processes, or changing or omitting data or results such that the research is not accurately represented in the research record”. Même si le risque pris en faisant une reconstitution complexe de figures est d’introduire des « erreurs » involontaires, dès lors qu’un type de modification significative de donnée est répété ou que son positionnement n’est pas le fruit du hasard, il ne pourra être considéré comme simple erreur.

Niveau V. La fabrication est le stade ultime. Elle consiste à créer de novo des résultats qui n'ont pas été obtenus en laboratoire, qu'il s'agisse d'expériences entières ou de parties d'expérience. En outre, il convient de rappeler que le comité a décidé de ne pas se demander si la faute constatée modifiait le message scientifique général fourni par les articles en question. Ce n'est pas la question qu'on nous a posée. Ce serait une expertise de nature différente.

En outre, il convient de rappeler que le comité a décidé de ne pas se questionner si la faute constatée a modifié le message scientifique général fourni par les articles en question. Ce n'est pas la question qui nous a été posée. Ce serait une expertise de nature différente. »

Le rapport traite de chacun des articles de Peyroche signalés sur PubPeer, j'en présenterai des extraits ci-dessous.

Article : J. Cell Science, 2001 ; Peyroche A., Corbeyrette R., Rambourg A. Jackson C.

Titre : The ARF exchange factors Geatp and Gea2p regulates the Golgi structure and function in yeast

Premier auteur : A. Peyroche. Auteur correspondant : C. Jackson. Auteurs auditionnés : Catherine Jackson.


« C. Jackson assume le montage des figures pour dit-elle « montrer des images représentatives des résultats ». Les figures ont été faites par elle. »

Tout ce que PubPeer a à montrer sur ce papier est le découpage non divulgué de la figure 4D. Le rapport explique pourquoi on ne peut pas comparer de manière convaincante les pistes de différents western blots les unes avec les autres, et conclut :

« On peut s’étonner de ce montage complexe de profils protéiques provenant de 8 découpages (encore appelé réarrangement, et qui peut soulever des doutes), et donc relativement lourd. Il n’en reste pas moins clair que refaire l’expérience de migration sur gel aurait été préférable. » [Surtout que le matériel protéique de départ semble toujours être disponible].

Le même découpage a été trouvé et critiqué dans les figures 2C-D et la figure 3A, dans tous ces cas une faute scientifique de niveau I / II a été trouvée.

 

Également sur les figures 6A-B et 5A-C, une méconduite de niveau II a été trouvée. Là, les auteurs ont réalisé un montage de diverses images de microscopie cellulaire de cellules individuelles pour les organiser en une seule image d'un petit champ. Le rapport note :

« Les documents en notre possession ainsi que les diverses auditions que nous avons pu entreprendre, ne nous ont pas permis de savoir si le montage a été réalisé à partir de prises de vues provenant d’une seule et même expérience ou d’expériences indépendantes. C. Jackson nous a affirmé que cette façon de procéder était une pratique courante à l’époque où a été écrit le papier. Enquête faite, et à la connaissance des membres de notre comité, ce genre de pratique ne se faisait pas. »

Catherine Jackson, qui en a pris la responsabilité, travaillait aux États-Unis lorsque ce document de 2001 a été rédigé. Elle est aujourd'hui directrice d’une équipe de recherche CNRS à l'Institut Jacques Monod de l'Université Paris Diderot. C'est peut-être pour cela que l'affaire devait être étouffée, donc classée seulement au niveau II.

Article : Molecular Biology of the Cell, 2003 : Chantalat, Sophie, Régis Courbeyrette, Francesca Senic-Matuglia, Catherine L. Jackson, Bruno Goud et Anne Peyroche.

Titre : A Novel Golgi Membrane Protein is a Partner of the ARF Factors Exchange Geap and Gea2p.

Premier auteur : Sophie Chantalat

Auteur correspondant : Anne Peyroche

Auteurs auditionnés : Catherine Jackson et Sophie Chantalat

Ici aussi, les chercheurs ont trouvé plus que disponible sur PubPeer, cet article a été recommandé pour la rétraction.

Tout d'abord, la figure 4A a été critiquée :

 




Le comité a déterminé qu'il s'agissait d'une méconduite en recherche de niveau IV, la deuxième plus élevée de leur classification :

« Il a été détecté qu’un cache (entouré de rouge sur l’illustration5) a été ajouté pour masquer la présence de l’ATPase 60kDa dans les fractions P100 et S100 bien visible sur l’original. Ce cache est donc un copier-coller comme le montre la figure de Pub Peer (en haut à droite).

On a donc ici un masquage volontaire de bandes d’un Western qui modifie les données brutes, à savoir que l’ATPase ne se trouve pas exclusivement dans la fraction P13 et ne cosédimente pas avec Arf2. »

Sophie Gérard-Chantalat travaille aujourd'hui en tant que responsable de la génomique fonctionnelle à l'Institut de biologie François Jacob, qui fait partie du CEA, l'institution sur le point de licencier Peyroche. Elle et Jackson font désormais partie de l'élite de la recherche française, et ce sont leurs thèses de doctorat qui sont désormais probablement entachées de manipulations de données. C'est probablement pourquoi Jackson et Chantalat ont nié toute responsabilité pour de fausses données dans leurs propres papiers et ont qualifié Peyroche de coupable :

«Catherine Jackson auditionnée le 21 février 2018 indique que c’est Anne Peyroche qui a commencé ce travail, sous sa direction lors de la fin de sa thèse. Le travail consistait à chercher des suppressions multicopies de mutations dans gea1 et gea2. C. Jackson étant partie aux USA (NIH) pour 5 ans, c’est Sophie Chantalat qui a terminé ce travail sous la direction d’A. Peyroche. Il faisait partie de son travail de thèse. D’après C. Jackson, ce serait A. Peyroche qui aurait préparé les figures et aurait entrepris la rédaction. L’audition de S. Chantalat le 16 avril 2018 confirme que ce travail a été commencé par A. Peyroche et qu’elle l’a terminé sous la direction d’A. Peyroche. Elle atteste que les figures ci-dessous, qui posent problème, n’ont pas été préparées par elle.».

Il y a eu d'autres cas de méconduite. Un Western blot découpé sur la figure 8B (sur-contrasté, pour éliminer les traces du découpage) contient 4 pistes, mais est constitué de 3 fragments, où nous devons faire confiance aux auteurs que les pistes de gel initialement disposées de manière chaotique montrent ce que les auteurs ont étiqueté. C'est une faute de niveau II.



La photographie finale de cette figure 1A a été assemblée à partir d'images de 5 plaques de dilution de levure différentes, comme le note le rapport, ce n'est pas quelque chose qui se fait :

« Question du Jury à S. Chantalat : « Pensez-vous que cette façon de faire est courante ? »

S. Chantalat.- « Évidemment que non. J'ai fait beaucoup de dilutions de ce genre pendant ma thèse et cela ne me viendrait pas à l'idée de le faire. C'est tellement simple, c’est la base. On ne fait cela que sur une seule boîte pour comparer. On ne casse pas une dilution. » »

Sur la figure 6, la même chose s'est produite que dans l'article précédent : des cellules ont été collectées à partir de différentes images et assemblées dans un seul champ, pour faire croire au lecteur qu'elles se trouvaient côte à côte, groupées. L'image publiée suggère que ces populations cellulaires étaient représentatives, mais bien sûr, nous ne savons pas à quel point ces cellules étaient rares en réalité, par rapport à la population cellulaire générale colorée dans cette expérience.

Ici aussi, les enquêteurs n'ont trouvé qu'une méconduite en recherche de niveau II.

Article : 2007 MOLECULAR CELL, Volume 27, 660-674, Le Tallec Benoit, Barrault Marie-Benedicte, Courbeyrette Regis, Guerois Raphael, Marsolier-Kergoat Marie-Claude, and Peyroche Anne

Titre : 20S proteasome assembly is orchestrated by two distinct pairs of chaperones in yeast and in mammals

Auteur : Benoit Le Tallec

Auteur correspondant : Anne Peyroche

Auteurs auditionnés : Benoit Le Tallec et Marie-Bénédicte Barrault

Benoit Le Tallec est chercheur titulaire à l'IBENS-CNRS, même institut à Paris où travaille l'un des deux fondateurs de PubPeer. Cet article et un autre de Le Tallec du laboratoire Peyroche ont fait l'objet d'une modération féroce de la part de PubPeer, qui a ensuite utilisé des commentaires signés et anonymes pour déclarer que ces preuves étaient des « artefacts de compressions d’images ».

Maintenant, ce papier horriblement faux a été recommandé pour une rétractation.

 

Le Tallec et le technicien Barrault ont tous deux déclaré :

« A. Peyroche aurait assuré seule la construction des figures et la rédaction du texte. »

C'est un peu incohérent, puisque auparavant Le Tallec n'a pas nié dans le journal Le Monde sa responsabilité pour ces mêmes figures faussées, et a parlé de leur avoir appliqué des améliorations « cosmétiques », quoi qu'il entendait par là. La nouvelle position de Le Tallec est cependant compréhensible, car ses deux articles dans Molecular Cell sont un désastre, et les publications dans PubPeer par mes lecteurs en fournissent de nombreuses preuves. Les enquêteurs en ont même trouvé davantage.

Artefacts de compression d’images ?

Le tableau de dilution de deux levures montrant deux mutants différents est en fait la même photographie en miroir et copié-collée. Les enquêteurs ont attribué une note de méconduite de niveau II :

" A l’examen des photographies originales des boîtes de levures, il a été constaté une inversion : les tétrades notées POC3∆ sont en fait POC∆4 "

Dans la figure 3 cependant, qui a été beaucoup discutée sur PubPeer et déclarée par les modérateurs de PubPeer comme des « artefacts de compression d’image », les enquêteurs ont trouvé de nombreuses versions et degrés de fraude différents.

L'épissage dans cette figure a été classé comme niveau de méconduite I/II, mais la présentation frauduleuse d'une bande de gel a3-HA à partir d'un IP anti-myc comme si elle appartenait à l'IP a3-HA a été classé comme niveau de méconduite IV.

« Plusieurs figures dans cet article montrent des protéines analysées par Western blot à partir d’extraits cellulaires totaux, d’immuno-précipitations ou de fractions obtenues après séparation sur gel filtration. Beaucoup font l’objet de « copier-coller ». »

La grosse double-bande du gel d'origine (cadre, à droite) a été masquée numériquement dans la figure finale (cadre, à gauche), ce qui a été jugé de niveau II/III, tandis que « M-B. Barrault et B. Le Tallec disent ne pas s’être aperçus de la manipulation ».

La même figure 3C contient un Western blot qui a été utilisé pour deux protéines différentes, Ump1 et POC3. Cela a été classé au niveau IV.

« Le Tallec indique : « Je n'ai pas remarqué cela au moment où j'ai corrigé les figures », « Au moment où les choses sont sorties sur Pub Peer, j'ai vérifié l'article, et quand j’ai vu cela, je me suis demandé comment c’était possible de ne pas l'avoir vu. » « Quand j’ai vu cela, j’ai été plutôt saisi. » »

Sur la figure 3D, une mauvaise conduite de niveau II/III a été trouvée : un western blot d'élution sur gel a été montré et quelqu'un a collé des bandes de gel qui n'en faisaient pas partie : ces échantillons n'ont « manifestement pas été collectés correctement lors de l'expérience de filtration sur gel ». Sur la figure 5D, il s'agissait déjà d'une méconduite de niveau IV, car ce même quelqu'un a ajouté 3 bandes de gel d'une expérience différente pour remplacer les bandes originales qui auraient pu miner le message scientifique souhaité :

« Cette manipulation voudrait montrer plus fortement le défaut de maturation du protéasome dans ces souches poc4∆. Non seulement il s'agit d'un mélange de 2 expériences différentes, mais en plus les bandes collées ne correspondent pas aux mêmes souches de levures. En effet, ces 3 bandes proviennent de l’analyse par gel filtration des souches Poc3∆ (d’après les données originales). Il y a donc un mélange des échantillons Poc3∆ et Poc4∆. »



Tout cela aurait été fait par Peyroche elle-même, car, comme Le Tallec l'a indiqué, sa contribution à son propre doctorat ne consistait certainement pas à faire beaucoup d'expériences en laboratoire ou à rédiger des articles et peut-être même pas sa thèse de doctorat. Il a déclaré qu'il avait cette humble assistante, Madame Peyroche, qui faisait toutes ces expériences pour lui, alors qu'il était probablement occupé sur sa Playstation, buvant une bière ou parcourant le monde. Quel mâle alpha que ce Le Tallec, ouaf ouaf de nous tous !



En fait, dans un cas, Le Tallec admet avoir fait au moins une expérience pour son article Molecular Cell, seulement pour accuser directement Peyroche d'avoir truqué ses données intactes :

« B. Le Tallec indique que cette expérience (Illustration 14) a été réalisée par lui, mais la figure présentée dans le papier proviendrait d’un Western blot réalisé par A. Peyroche ; les résultats de cette expérience auraient été assemblés sous forme de figure par elle. On note une modification selon les puits des intensités des protéines 6 et GAPDH ; ce dernier ayant été utilisé comme contrôle. En effet, il semble que les copier-coller du puits contrôle proviennent de temps d’exposition différents. »

Cela a été évalué au niveau II/III.

Article Molecular Cell, 2009, Benoit Le Tallec, Barrault Marie-Benedicte, Raphael Guerois, Carré Thibault et Peyroche Anne.

Titre : Hsm3/S5b participate in the assembly pathway of the 19S regulatory particle of the proteasome

Premier auteur : Le Tallec B.

Auteur correspondant : Peyroche A.

Auteurs auditionnés : Benoit Le Tallec et Marie-Bénédicte Barrault

« Cet article comme le précèdent comporte de nombreuses manipulations/collages /assemblages. M.B. Barrault qui fut le maître d’œuvre de la partie purement biochimie, nous dit-elle, transmettait à AP les données brutes (Western blots identifiant les diverses protéines éluées par gel filtration). Cette dernière s’occupait de faire les figures, étape au cours de laquelle M.B. Barrault n’était pas impliquée. »

Ce papier a également été recommandé pour une rétractation.

Ici, les figures 2A et 2B ont été décrites comme de « multiples collages ». La figure 2E a réutilisé les données de la figure 3C de Le Tallec et al Molecular Cell 2007, tandis que les chiffres et les positions des marqueurs de poids moléculaire ont été modifiés entre ces deux figures. La manipulation des profils d'élution a rendu les résultats présentés de la co-élution de deux protéines différentes dans les mêmes fractions de gel comme n'étant plus crédibles. Cela a valu aux auteurs le niveau IV de méconduite en recherche.

La figure 5C « rassemble plusieurs pistes issues probablement de plusieurs expériences. Il y a aussi une superposition d'images laissant une certaine ambiguïté » Niveau I/II

Ce gel au bleu de Coomassie découpé ci-dessus a déjà été signalé par mes lecteurs sur PubPeer. Les enquêteurs ont trouvé d’autres problèmes.

Comme cette figure 5D ici, qui a été certifiée de niveau IV de méconduite. Les images de dilutions d'un génotype de levure sont dupliquées, voire triplées dans un contexte différent pour remplacer un génotype de levure différent.


Et la deuxième partie de cette figure est encore pire :

« Aucun des cinq autres panneaux de la figure publiée (figure 5D) ne reflète les résultats observés sur la plaque originelle montrée sur le panneau du bas. On pourrait ne serait-ce que sur cette figure, donner d’autres exemples où il ressort qu’aucun des panneaux représentés dans la figure publiée ne se rapporte à l’expérience originale. Au vu de ces figures, B. Le Tallec s’est dit « consterné ». Selon ses dires, il n’aurait pas du tout été tenu au courant de ces arrangements de figure, lui qui était à l’origine de ces expériences. [...] la partie biochimique étant selon lui, réalisée par M.B. Barrault, celle concernant la présentation des figures pour la publication étant réservée exclusivement à Anne Peyroche. »

Pour la figure 6C, les images des colonies de levures se sont avérées un « assemblage », avec des données d'images d'origine manquantes. Le Western blot dans la même figure était un assemblage de pistes également, avec la conclusion que « aucune d'elles ne reflète les résultats originaux », une méconduite de niveau III.

 

Inutile de dire que ces deux papiers de Molecular Cell, avec lesquels il prétend maintenant n'avoir presque rien à voir, parce que d'autres faisaient les expériences, assemblaient des figures et rédigeaient ses papiers, ces deux articles dans une revue d'élite ont certainement assuré à Le Tallec son mandat actuel. Un poste de chercheur que de nombreux scientifiques qualifiés convoitent en vain. Et il est même peu probable qu'ils se rétractent ou envoient même des Errata. Le vaisseau mère Cell est connu pour accueillir des auteurs douteux, y compris Voinnet.

Article PNAS, 2011, Barrault Marie-Benedicte., Nicolas Richet, Chloé Godard, Brice Murciano, Benoit Le Tallec, Erwann Rousseau, Pierre Legrand, Jean Baptiste Charbonnier, Marie Hélène Le Du, Raphael Guerois, Françoise Ochsenbein et Peyroche Anne.

Titre : Dual functions of the Hsm3 protein in chaperoning and scaffolding regulatory particles subunits during proteasome assembly

Premier auteur : Barrault Marie-Benedicte

Auteur correspondant : Anne Peyroche et Françoise Ochsenbein

Auteurs auditionnés : Françoise Ochsenbein

Françoise Ochsenbein est chef d’équipe à l'Institut de Biologie Intégrative de la Cellule, qui fait également partie du CEA. Elle a déclaré que « sa responsabilité en tant qu’auteur correspondant ne concernait que la partie structurale ».

 






Dans cet article, Anne Peyroche elle-même a répondu en novembre 2017 à certaines des préoccupations que mes lecteurs ont publiées sur PubPeer et a fourni des scans de gel originaux. Le comité a soupçonné ces événements de découpage d'indiquer « l'origine différente des expériences » et a classé ces problèmes comme étant de niveau I/II. Nous apprenons également :

« F. Ochsenbein aurait, dit-elle, procédé différemment en ce qui concerne les assemblages de la figure 6 mentionnés ci-dessus : « refaire un seul gel de migration de protéines et refaire l’expérience de croissance des souches de levure sur un seul support » »

Il y avait d'autres problèmes, déjà signalés par mes lecteurs sur PubPeer. Le rapport les a également abordés.

Sur le gel au bleu de coomassie découpé de la figure 6B, les experts ont attribué le niveau I/II de méconduite et soupçonné que « Au vu des profils de migration, il semblerait que cela provienne de plusieurs gels et/ou peut-être d’expériences différentes ». Le test de colonie de levure a également été découpé, avec des images de colonies collées, « suggérant que ces expériences n’ont pas été réalisées dans les mêmes conditions expérimentales ». C'est le niveau II de méconduite en recherche.

Voici les conclusions que les experts ont tirées à la fin de leur rapport :

« De nombreuses marques de méconduite ont été retrouvées dans les cinq articles incriminés. Les anomalies constatées se sont révélées de gravité variable selon les figures et selon les articles, allant de l'embellissement à la falsification modifiant l'interprétation des données représentées sur certaines figures.

Ces constatations réalisées par le comité d’audition sont complètement en accord avec celles formulées par les quatre premiers experts sollicités par le CEA, à la nuance près que le comité d'audition a examiné un nombre plus important de figures ainsi que des copies de données originales et a travaillé de façon collégiale.

Un point essentiel était d'entendre les auteurs des articles pour leur laisser l'opportunité d'expliquer les faits observés et d'écouter leurs réponses, particulièrement pour ce qui concernait leur responsabilité personnelle. Les cinq co-auteurs auditionnés qui étaient tous, rappelons-le, soit des premiers auteurs, soit des auteurs correspondants ont affirmé, de façon vérifiable sur les enregistrements, que AP a eu la responsabilité exclusive de la préparation et la composition des figures, sauf peut-être en ce qui concerne l'article de 2001. Ils ont tous dit ne pas avoir suivi la préparation des figures tout au long du processus de la publication et avoir seulement constaté avec surprise les anomalies observées à l'occasion de la publication des allégations du site Pub Peer. 

Il faut mentionner que nous n'avons pas pu écouter la version de A. Peyroche, ce qui pourrait laisser des doutes sur la véracité des déclarations des coauteurs.

Le problème est de savoir si certains de ces éléments doivent faire l'objet d'un erratum ou d'une rétractation. C'est, de l'avis de la formation d'instruction, le cas des articles de 2003, 2007 et 2009.

Au total, après audition d’Anne Peyroche, il apparaît que des méconduites sérieuses ont été commises dans la composition des figures incriminées de 3 des 5 articles analysés, ceux de 2003, 2007 et 2009. La pleine responsabilité de AP apparaît clairement, même si on peut se demander comment des premiers auteurs ou des auteurs correspondants aient pu avoir un regard aussi furtif sur des publications dans lesquelles ils avaient une responsabilité majeure. »

 

[note : le passage :

« Il faut mentionner que nous n'avons pas pu écouter la version de A. Peyroche, ce qui pourrait laisser des doutes sur la véracité des déclarations des coauteurs.

Le problème est de savoir si certains de ces éléments doivent faire l'objet d'un erratum ou d'une rétractation. C'est, de l'avis de la formation d'instruction, le cas des articles de 2003, 2007 et 2009. »

A été transformé, après audition d’Anne Peyroche, en :

« A la fois dans le texte soumis au comité par AP avant son audition et lors de son audition, AP a confirmé sa responsabilité complète dans la préparation des figures et dans les éventuelles méconduites incriminées. »]

 [Note : Depuis, le rapport complet est disponible ICI]

 

 

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