Anne Peyroche
démise de ses fonctions de présidente intérimaire du CNRS car ses publications
sont « remises en question »
ceci est une traduction de l'article de Leonid Schneider
Les événements se sont produits au sein du réseau d’instituts de recherche de l’État français, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Leur présidente par intérim, Anne Peyroche, a maintenant été démise de ses fonctions prématurément en raison de preuves de manipulations de données dans ses articles, publiées sur PubPeer, que j'ai aidé à découvrir. Comme tout le mérite revient à PubPeer (dirigé principalement par deux chercheurs du CNRS), l'annonce ne fait malheureusement pas référence à mon appel à une petite révolution au sein du CNRS, où ces manipulations de données ont été présentées à un public plus large. La lettre officielle que j'ai obtenue est ci-dessous, à la fois en traduction anglaise et dans son original français.
Selon des journalistes Anne Peyroche serait mise en procédure de mise a pied par le CEA pour fraude et serait en dépression expliquant son "empechement". Mais le CEA n a pas confirmé/infirmé. Sur pubmed AP explique que le mauvais matos du CEA est en cause
— Philippe Froguel (@philippefroguel) January 18, 2018
Une autre scientifique directrice
de recherche au CNRS, posant des problèmes, Catherine Jessus,
qui en tant que directrice
de l'Institut des sciences biologiques (INSB) est la biologiste en chef au
CNRS, a été acquittée en novembre 2017 par une enquête secrète à l'Université
Pierre et Marie Curie (UPMC) malgré toute
cette longue liste de
manipulations de données suspectées trouvées dans ses papiers (que j'ai
initialement présentés dans cet
article). Alors que Peyroche fait face à une enquête disciplinaire de son
employeur, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives
(CEA), rien de ce genre ne semble menacer Jessus. Au lieu de cela, les
chercheurs du CNRS qui osent protester contre ses lacunes en matière
d'intégrité de la recherche sont menacés et terrorisés, par une Jessus furieuse
en personne et ses partisans au sommet du CNRS.
Catherine Jessus explains to CNRS units directors that she has been cleared from misconduct by Paris 6 university pic.twitter.com/cxDb2kBIyE
— Philippe Froguel (@philippefroguel) November 28, 2017
Enfin, un Institut de Biologie
Moléculaire des Plantes (IBMP) de Strasbourg, particulièrement rongé par les
manipulations de données, ancien domicile du légendaire Olivier Voinnet
(sur lequel Jessus a autrefois enquêté pour avoir fait les mêmes vilaines choses
dans lesquelles elle semble s’être désormais elle-même aventurée) a publié un Code d'éthique et de recherche
responsable, qui avertit les auteurs potentiels:
L'IBMP définit la méconduite scientifique comme : "La manipulation sélective, la fabrication ou la falsification de données scientifiques."
Le fait est que la directrice de
l'IBMP, Laurence
Maréchal-Drouard, avec sa doctorante et maintenant membre titulaire du
laboratoire, Thalia
Salinas, s'est récemment rendue sur PubPeer pour admettre exactement ce
type de méconduite, après que j’aie publié des
preuves de manipulations de données dans les nombreuses publications de
Drouard et la thèse de doctorat de Salinas.
https://twitter.com/bmstell/status/932302303889186816
L’honnêteté désarmante de Drouard
sur PubPeer (ici,
ici,
ici
et ici)
a été dûment récompensée par le siège du CNRS à Paris: elle est désormais
confirmée à la direction de l’IBMP. Drouard a cependant deux nouveaux adjoints
: Magali
Daujat et Philippe
Giege (mari de Salinas, son propre pédigrée PubPeer ici). Les champions de
l'intégrité de la recherche nouvellement installés auront beaucoup de monde qui
devra « faire l'objet de sanctions disciplinaires CNRS », dans leurs propres
papiers et ceux de leurs collègues de l'IBMP, certains décrits ici.
Par exemple cette beauté d'un gel, du laboratoire d'Anne-Catherine
Schmit :
Arrière-plan de gel vide, apparemment cloné 5 fois dans Janski et al, Plant Cell 201, source Pubpeer
Le nouveau président par intérim
du CNRS est désormais annoncé
publiquement comme étant Antoine
Petit, par arrêté du président de la République, mis en œuvre par le
ministre chargé de la recherche. Dans ce communiqué, Peyroche serait « actuellement
empêchée », aucun détail supplémentaire n'est donné. J'ai cependant reçu une lettre
du CNRS. Du fait de mes rapports continus sur les manipulations de données
CNRS, je reste bloqué par le CNRS sur Twitter, pour limiter la diffusion de
l'information. Le CNRS, du ministère français de la Recherche, ne m’a jamais
non plus précisé si l’annonce de Jessus selon laquelle le CNRS me poursuivrait
en justice était sérieuse. Vous êtes invité à partager cette nouvelle, mais
attention au tempérament de Jessus !
Breaking news: interim CNRS president Anne Peyroche. Obliged to step down due to #pubpeer allegations of putative fraud. New president Antoine Petit takes office earlier than expected
— Philippe Froguel (@philippefroguel) January 18, 2018
CNRS : Antoine Petit président par intérim en remplacement d’Anne Peyroche, dont des publications sont mises en cause
© Inria / C. Morel Antoine Petit “est chargé d’exercer par intérim les
fonctions de président” du CNRS, “en remplacement d’Anne Peyroche”, annonce un
arrêté du 17 janvier 2018 de la ministre de l’Enseignement supérieur,
de la Recherche et de l’Innovation, Frédérique Vidal, publié au Journal officiel jeudi 18 janvier. L’arrivée d’Antoine Petit au
CNRS intervient plus tôt que prévu : sa nomination à la présidence de
l’organisme, proposée par le gouvernement, vient à peine d’obtenir un avis
favorable du Parlement le 17 janvier et n’a pas encore été entérinée en
conseil des ministres (lire sur AEF). Anne
Peyroche “se trouve pour l’heure empêchée”, explique le MESRI dans un
communiqué. Selon les informations recueillies par AEF, cet empêchement d’Anne
Peyroche serait lié au signalement sur le site PubPeer de suspicions de manipulation de
données dans 5 publications dont elle est signataire ou cosignataire.
Dans
un communiqué diffusé le 18 janvier, le ministère de l’Enseignement
supérieur, de la Recherche et de l’Innovation indique que la nomination
d’Antoine Petit à la présidence par intérim du CNRS intervient alors qu’Anne
Peyroche “se trouve pour l’heure empêchée”. Anne Peyroche aurait normalement dû
occuper l’intérim de la présidence jusqu’à la nomination en conseil des
ministres d’Antoine Petit comme président, le 24 janvier.
5
ARTICLES D’ANNE PEYROCHE MIS EN CAUSE DANS PUBPEER
Selon des informations recueillies par AEF, l’absence
d’Anne Peyroche serait liée à la mise en cause de plusieurs articles
scientifiques dont elle est auteur ou coauteur. En novembre 2017, cinq
publications signées ou cosignées par Anne Peyroche ont en effet été signalées
sur le site PubPeer. Créé en 2012 et
adossé depuis 2015 à la fondation californienne du même nom, ce site se donne
pour vocation d’ “améliorer la qualité de la recherche scientifique par le
biais d’approches innovantes pour les interactions de la communauté”. En
pratique, ses utilisateurs y signalent des articles scientifiques dans lesquels
ils ont relevé des anomalies susceptibles d’en affecter les conclusions.
Anne Peyroche apparaît en premier auteur de l’une des
publications signalées, datant de 2001, et en dernier auteur (chef d’équipe) de
quatre autres publications, parues entre 2003 et 2012. Ces articles sont
parus dans les revues Journal of Cell Science, Molecular
Cell, Molecular
Biology of the Cell et Proceedings of the
National Academy of Sciences. Les anomalies
repérées dans ces cinq publications par les commentateurs portent sur des
images expérimentales. Y sont relevées de soudaines ruptures dans les fonds
d’image, ou des portions d’image identiques se répétant, pouvant laisser penser
selon les commentateurs que les images auraient été manipulées.
Deux réponses ont été apportées par les auteurs, dont une
par Anne Peyroche à l’article le plus récent paru en 2012 dans les Proceedings of the National Academy of
Sciences. Elle fournit dans sa réponse,
datée du 28 novembre, les clichés des autoradiographies originales et
apporte des explications sur les anomalies repérées par les commentateurs. Deux
d’entre eux ont posté des messages pour la remercier d’avoir fourni ces clichés
originaux, l’un des commentateurs ajoutant que “cela lève tout doute qu’ [il]
aurait pu avoir”.
LE
PARCOURS D’ANNE PEYROCHE
Anne Peyroche, directrice générale déléguée à la science
du CNRS depuis janvier 2016 (lire sur AEF), était présidente par intérim du CNRS depuis le
24 octobre 2017, après le départ d’Alain Fuchs à la présidence de PSL
(lire sur AEF).
Biologiste, elle a commencé sa carrière au CEA – dont elle est toujours
employée – où elle a créé sa propre équipe de recherche en 2004, avant de
devenir adjointe au chef du service de biologie intégrative et de génétique
moléculaire en 2009, puis directrice adjointe en 2013 de l’unité de “génétique
moléculaire et destin cellulaire”, associant le CEA, le CNRS et l’université
Paris-Sud.
Ses travaux ont été récompensés en 2009 par le prix
Victor Noury de l’Académie des sciences (1). Elle est également lauréate du
prix Irène Joliot-Curie en 2010, dans la catégorie “jeune femme scientifique” (lire sur AEF).
Elle intègre en 2014 le cabinet de Geneviève Fioraso,
secrétaire d’État chargée de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, comme
conseillère recherche (lire sur AEF), poste
qu’elle conserve en 2015 après la nomination de Thierry Mandon au secrétariat
d’État (lire sur AEF), avant
d’être promue en octobre 2015 directrice adjointe du cabinet, en charge de
la recherche (lire sur AEF).
(1)
Le nom complet du prix est “Victor Noury, Thorlet, Henri Becquerel, Jules et
Augusta Lazare”.
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