mercredi 11 novembre 2020

Pandémie due au virus sars-cov-2 en milieu scolaire

 

Pandémie due au virus sars-cov-2 en milieu scolaire

 

I) Avis du Haut Conseil de la Santé Publique du 10 Juin 2020

1) Contexte

Après un confinement général de la population, des recommandations ont été publiées le 24 Avril 2020 pour accompagner le déconfinement de mesures barrières et de distanciation physique. Celles-ci ont été complétées par un avis du Haut Conseil de la Santé Publique, paru le 10 Juin 2020. Il est accompagné d’une lettre de Jérôme Salomon qui résume son contenu.

Ce document se préoccupe de l’impact de la situation d’isolement sur la santé des élèves et propose d’assouplir certains aspects de la doctrine sanitaire applicable aux établissements scolaires. Il affirme entre autres :

« La Covid-19 touche essentiellement les adultes » : affirmation sourcée par deux études portant sur le début de l’épidémie en Chine, publiées très tôt (Mars/Avril),

La première (Dong et al.) disant clairement le contraire : “Although clinical manifestations of children’s COVID-19 cases were generally less severe than those of adult patients, young children, particularly infants, were vulnerable to infection.”

La seconde (Liu et al.) indiquant également le contraire : “This study showed that Covid-19 occurred in children, causing moderate-to-severe respiratory illness, in the early phase of the SARS-CoV-2 outbreak in Wuhan and was associated with ICU admission in one patient.” et “Our findings indicate that SARS-CoV-2 infections in children were occurring early in the epidemic.”

« Les enfants se sont révélés moins souvent porteurs du virus Sars-CoV-2 que l’adulte et les données disponibles sur la contagiosité des plus jeunes lèvent de nombreuses inquiétudes » : affirmation reposant sur quatre études

La première (Zhu et al.) est une étude au début de l’épidémie sur 31 familles, en preprint sur medrxiv où il suffit de lire le commentaire pour se rendre compte du problème :

« People are citing this study as indicating that children do not bring the infection home, but the study only identifies the first person showing symptoms and sign, which may be less apparent in children. Circular argument. »

Les auteurs ont répondu :

« Hi Joanna, we were also concerned that this about this possibility and you will see that we addressed this in the results section of the article. Thanks for your comment »

La seconde étude (Munro et al.) n’est en fait qu’une revue incluant ce premier papier et certains autres très peu significatifs (faibles échantillons) ou encore fortement critiqués.

La troisième étude (Gudbjartsson et al.) est une analyse faite dans la population Islandaise. Celle-ci dit, après avoir proposé des tests au hasard dans la population :

« In a population-based study in Iceland, children under 10 years of age and females had a lower incidence of SARS-CoV-2 infection than adolescents or adults and males. »

Cette étude indique un taux de positivité croissant avec l’âge, lorsque la population est prise au hasard. On note toutefois qu’à partir de 10 ans, le taux de positivité monte drastiquement. Elle a été sévèrement critiquée car la situation Islandaise est particulière. En réalité, le premier cas était d’une certaine tranche d’âge et a transmis dans sa classe d’âge, provoquant une distribution initiale de la maladie non équilibrée. Plus tard, avec le confinement, les enfants étaient moins à risque également d’être infectés. La distribution serait donc davantage due à la distribution initiale du premier cluster qu’à un rôle moins important de la transmission chez les enfants… D’ailleurs l’intention même de cette publication n’était pas d’étudier la transmission chez les enfants.

La quatrième étude (Danis et al.) étudie un cluster précis et s’intéresse au fait qu’un unique enfant asymptomatique n’aie pas transmis le virus. Cette étude tire des conclusions par rapport à cet unique enfant, ce qui est tout de même très limité statistiquement.

Le document décrit enfin plus en détail une étude (Cohen et al., également critiquée notamment parce que les tests PCR sur les enfants sont souvent négatifs en swab nasal et positifs dans les selles) montrant que sur 603 enfants, très peu d’enfants ont eu une RT-PCR positive (1,8%) mais un grand nombre a eu une sérologie positive (10%). Une seconde étude (Levy et al., ayant eu un score automatisé d’analyse de rigueur scientifique de 0/5) est également décrite, analysant 52588 tests réalisés entre le 2 Mars et le 24 Avril 2020, et dans laquelle la positivité des enfants (5,9%) était bien plus faible que celle des adultes (20,3%).

S’appuyant sur ces études, il est affirmé que « les enfants seraient de très faibles agents contaminateurs mais qu’ils auraient plutôt été infectés par leurs proches (parents) en phase de confinement » et « la différence des taux de positivité et la rareté des contaminations à l’école plaident pour un rôle faible des enfants dans la dynamique de l’épidémie et pour une contagion dans le sens adultes enfants ».

D’une part, les enfants étant plus souvent asymptomatiques, ils ont très probablement été moins testés que les adultes, d’où une moins bonne détection des cas de contamination en milieu scolaire et le taux plus faible de RT-PCR positive que de sérologie positive (indiquant que l’enfant a porté le virus par le passé mais n’avait pas été détecté). D’autre part, les enfants étant souvent asymptomatiques, il est évident que la positivité sur des tests réalisés souvent suite à l’apparition de symptômes sera plus importante chez les adultes.

Le document oppose à ces observations l’incidence des violences domestiques et la nécessité du retour à l’école selon les sociétés françaises de pédiatrie, y compris ceux porteurs d’un handicap, indiquant également les inconvénients soulevés par l’UNESCO (interruption de l’apprentissage, difficultés de l’alimentation, difficulté pour les parents à encadrer le travail scolaire, insuffisance d’accès aux technologies).

La réouverture de 85% des établissements après le confinement de Mars ne s’est accompagnée d’un retour à l’école que de 22% des élèves.

2) Recommandations

 

En général :

- Communication (parents d'élèves et personnels)

- Hygiène des mains (HDM) fréquente et port de masque (modalités de rangement sécurisé avec protocole défini (repli sans contacts extérieur/intérieur, pochette individuelle, accroche isolée…)

- Actions pédagogiques relatives aux mesures d’hygiène individuelle et collective

- Disposer et renouveler des fournitures adéquates (savon, lingettes etc)

- La priorité doit être donnée aux enfants « vulnérables » si impossibilité d'accueillir tous les élèves

 

Distanciation :

- Accompagnement des élèves devant l’établissement organisé

- Distance physique d’au moins 1 mètre doit être respectée dans les classes entre le bureau de l’enseignant et les élèves et entre les élèves en position côte à côte (« latéralement ») ou en face à face.

- Ceci ne s'applique pas en extérieur, mais il convient alors de veiller à ne pas mélanger dans le temps les groupes constitués comme les différentes classes entre elles

- Jeux autorisés à condition de nettoyer

- Dans les pauses et activités périscolaires, éviter les regroupements d’élèves de différentes classes

 

Hygiène :

- vigilance sur l'hygiène des mains (lavage 30 secondes de préférence eau et savon)

- mise à disposition de savon et de lavabos

 

Restauration :

- privilégier la cantine

- distance d'un mètre

- nettoyage de fours à micro-ondes collectifs

- nettoyage sols et surfaces une fois par jour minimum

 

Environnement :

- aération 10 et 15 min le matin avant l’arrivée des élèves, à chaque intercours, au moment du déjeuner et le soir pendant le nettoyage des locaux

- vérifier le fonctionnement VMC

- pas de ventilateur dirigé vers les élèves

- Hygiène des toilettes avec papier, savon, poubelles etc…

- Objets partagés (ballon, crayons…) doivent être nettoyés au minimum une fois par jour

 

Personnels réalisant l’entretien :

- gants, lavés ou jetés après usage

- lavage au savon une fois les gants retirés

- lavage des vêtements après opération effectuée

 

Traitement des cas :

- Rester à domicile si symptômes compatibles

- Prise de température le matin en cas de symptômes ou de sensation de fièvre

- Evénements et rassemblements autorisés avec port du masque

- Repérage des élèves avec symptômes

- Accompagner l’élève à l’infirmerie en cas de signes cliniques

- Suivi de cas contact si un cas positif est détecté, avec possibilité de fermer l’établissement à l’appréciation des autorités compétentes

 

 

 

II) Avis du Haut Conseil de la Santé Publique du 7 Juillet 2020

 

1) Contexte

 

Pour préparer la rentrée 2020, dans un contexte d’assouplissement général, un nouvel avis a été donné par le HCSP le 7 Juillet 2020. Ce document est plus riche en références que celui du 10 Juin 2020, mais utilise certaines de ses références. Les références sont séparées par thématiques.

 

A) Susceptibilité des enfants

Dépistages de cas secondaires, enfants moins souvent positifs que les adultes :

- Wang et al. : qui dit clairement que des tests sérologiques n’ont pas été effectués et qu’il est donc impossible de conclure quant à la plus faible infectivité des enfants :

“People of all ages seem to be susceptible to SARS-CoV-2. [...]Based on the available evidence, without the results of serological studies, it is hard to tell if children are not susceptible.”

- Li et al. : Les 392 contacts de 105 patients ont été testés, et on a retrouvé une plus grande positivité chez les adultes (17,1%) que chez les enfants (4%), mais les auteurs tempèrent ce résultat en précisant qu’il existe des facteurs confondants comme les comportements :

“However, the real causes leading to the different secondary attack rates between adult and children needed to be more explored and many factors could influence the secondary transmission of epidemic diseases in household, such as behaviors of contacts and occupations of members”

- Zhang et al. : Dans cette étude, c’est le rapport entre nombre de cas positifs et nombre de contacts qui est estimé, et elle montre clairement que le nombre de contacts est extrêmement élevé pour les plus jeunes. Les périodes de vacances scolaires réduisent drastiquement les cas d’infection. Cependant, rapporté au nombre de contacts, les enfants sont moins susceptibles de développer la maladie. Est-ce que l’augmentation des contacts est un facteur confondant ? Quid des adultes qui auraient un nombre de contacts aussi élevé que les enfants à l’école ?

- Jing et al. : Les premiers cas en Chine ont été étudiés, il s’agit principalement de cas symptomatiques, la plupart étant des adultes et 5% étant des enfants, mais on ne peut en tirer de conclusions quant à la susceptibilité des enfants, justement parce qu’on a très peu d’asymptomatiques, et qu’on n’a aucune idée de la configuration de la population totale testée.

- Cheng et al. : étude sur des cas contacts à Taïwan. Il est intéressant de noter qu’ici, la variable employée est appelée « attack rate », risque d’infection secondaire. Les résultats ne sont pas significativement différents entre les classes d’âge, les intervalles de confiance se chevauchant pour toutes les classes d’âge (moins de 20 ans de 0 à 1,4 ; les 20-39 ans de 0,2 à 1,1 ; les 40-59 ans de 0,6 à 2,1 et les plus de 60 ans de 0,3 à 2,6). Cette étude va à l’encontre d’une susceptibilité plus forte chez les enfants, malgré sa faiblesse statistique (petit échantillon).

 

Sérologie moindre chez les enfants que chez les adultes en population générale :

- Mizumoto et al. : des cohortes symptomatiques, sans compter les asymptomatiques donc, montrent un plus fort taux d’infection chez les enfants que chez les adultes…

- Lavezzo et al. : la ville de Vo’, où le premier cas Italien de COVID19 a été détecté, a été confinée et l’ensemble de la population a été testée. Sur les 73 cas positifs découverts, aucun enfant de 0 à 10 ans mais une prévalence de 1,2% pour les 11-20 ans, de 1,7% pour les 21-30 ans, de 2,4% pour les 31-40 ans, de 1,1% pour les 41-50 ans, de 3,2% pour les 51-60 ans, de 3,9% pour les 61-70 ans, de 6% pour les 71-80 ans et de 2,2% pour les plus de 80 ans. Comme il n’y a pas eu de tests sérologiques, on ne peut pas savoir si des enfants avaient été infectés avant.

Marina Pollan et al. : Dans cette étude assez large menée en Espagne, des foyers ont été testés au hasard pour vérifier la prévalence de la positivité en sérologie, les résultats sont présentés dans le tableau suivant :

Cette étude présente également de grandes différences entre les personnes actives ayant maintenu un emploi et les personnes sans emploi, puisqu’elle a couvert la période du confinement. On peut donc raisonnablement penser que les enfants, qui n’ont pas de différence significative avec les classes d’âge de 20 à 34 ans ou de 35 à 49 ans, sont davantage assimilables à la partie de ces personnes n’ayant pas d’emploi en période de confinement (prévalence de 3,5%).

- le RIVM : qui indique que les enfants de tous âges sont susceptibles de contracter le virus. 1,1% des 100 000 enfants testés étaient positifs contre 2% de la population générale (940 000). La contamination se fait principalement de tranche d’âge à tranche d’âge identique, les plus contaminants dans leurs tranches d’âge étant les 20-24 ans suivis des 15-19 ans et des 25-29 ans.

 

Sérologie identique chez les enfants et chez les adultes en population générale :

- La Swedish Public Health Agency : 738 participants avec un taux de positivité maximal chez les 0-15 ans (2,8%) mais sans différence significative avec les autres tranches d’âge (allant de 2 à 2,6%).

- L’Office statistique de Londres : page 1h du document indiquant un taux de positivité comparable pour toutes les tranches d’âge, le plus élevé étant dans la classe de 16 à 24 ans.

- Streek et al. : une étude sur 919 individus avec une positivité en sérologie similaire dans toutes les classes d’âge.

- Stringhini et al. : 2766 participants après la première vague en Suisse avec une sérologie proche dans toutes les classes d’âge sauf pour les moins de 10 ans.

 

Sont également re-cités Gubjartsson et al. et Lévy et al. déjà discutés précédemment.

 

B) Fréquence des formes graves chez les enfants

 

- Bialek et al. : les symptômes semblent moins prononcés chez les 2572 enfants positifs sur un total de 149760 cas détectés.

- Lu et al. : symptômes moins prononcés d’après les données Chinoises sur 171 enfants positifs

- Qiu et al. : symptômes modérés chez 36 enfants en Chine

- Tagarro et al. : 25 enfants hospitalisés sur 41 positifs parmi 365 testés en deux semaines en Espagne. Quatre ont été transférés en soins intensifs avec assistance respiratoire. Les tests étaient réservés aux personnes symptomatiques en hôpital face au grand nombre de cas, ce qui a pu biaiser les résultats vers une sévérité accrue.

- Parri et al. : sur 100 enfants positifs, 9 ont eu besoin d’assistance respiratoire.

- Parri et al. : sur 130 enfants positifs, 11 en état sévère et 9 en état critique.

- Morand et al. : un preprint de l’IHU Méditerranée avec Didier Raoult, dont on peut mettre en doute les PCR. Cependant, on peut sans doute faire confiance aux données cliniques, sur 130 enfants, 21 ont été admis en hôpital immédiatement, 10 ont été hospitalisés par la suite et un seul a été admis en soins intensifs. La conclusion, en phrase finale du papier, cite Zhu de façon erronée, comme indiqué précédemment, comme une preuve selon laquelle les enfants ne contamineraient pas les familles.

- de Souza et al. : une méta-analyse de 38 études avec 1124 cas identifiés chez des enfants avec 2,1% de cas sévères et 1,2% de cas critiques. Des limitations sont indiquées (certains cas ont pu être cités par diverses études et donc comptés en double notamment).

- Ludvigsson : une méta-analyse de 45 études avec une mortalité extrêmement rare et des symptômes moins sévères que chez l’adulte dans l’ensemble.

- Oualha et al. : sur 27 enfants ayant des cas graves

 

Sont également recités Dong et al. et Liu et al., déjà discutés précédemment.

 

C) Les enfants seraient moins transmetteurs que les adultes

 

- NCIRS : dans les écoles, seuls 2 cas positifs ont été détectés sur 863 contacts par PCR. Cette étude a été affinée ensuite, avec un total de 1448 contacts dont 633 ont été testés, avec 18 cas détectés, soit par PCR soit par sérologie. Tous n’ont pas été testés par les deux techniques.

- Fontanet et al. : 326 élèves, enseignants et personnels d’un lycée de l’Oise ainsi que 346 membres de leurs familles ont participé à cette étude. 171 avaient des anticorps, neuf ont été hospitalisés. Le lycée avait un taux d’attaque d’infection de 40,9% alors que la famille n’était qu’à 10,9%. En moyenne, c’est un taux de 25,9% qui a été calculé. Comparé au taux présent chez les donneurs de sang alentours, qui est de 3%, c’est très élevé. Mais Les auteurs ont considéré que le chiffre était faible compte tenu du fait que le lycée se trouve au centre de l’épidémie française.

- Fontanet et al. 2 : Dans la même période, dans les écoles primaires au même endroit, 45 élèves sur 510 (8,8%) étaient positifs contre 3 enseignants sur 42 (7,1%), 1 personnel sur 28 (3,6%), 76 parents sur 641 (11,9%) et 14 proches sur 119 (11,8%). Lorsque les enfants étaient positifs, 61% des parents et 44% des fratries étaient positifs aussi, alors que seuls 6,9% des parents et 11,8% des fratries l’étaient avec des enfants négatifs.

- Jones et al. : la charge virale est évaluée chez différentes classes d’âge et se trouve être constante quel que soit l’âge.

- Colson et al. : étude très critiquée qui indiquerait que les enfants ne jouent pas un rôle dans l’épidémie car auraient moins souvent une charge virale élevée…

 

Sont également cités Munro et al. et Danis et al. déjà décrits précédemment.

 

2) Recommandations

 

Un assouplissement est proposé pour la rentrée :

- La distanciation physique qui n’est plus indispensable.

- La gestion du flux de circulation dans l’établissement est levée.

- Il est demandé d’anticiper pour être en mesure d’assurer la continuité pédagogique si l’épidémie reprend en Automne.

- Le transport scolaire n’est plus soumis à la distanciation physique.

- Les masques sont obligatoires pour les enfants même en maternelle et en primaire.

 

III) Avis du Haut Conseil de la Santé Publique du 9 Septembre 2020

 

 

Cet avis concerne le port du masque dans les structures accueillant des enfants de 0 à 3 ans. Après un rappel du contexte, notamment épidémiologique indiquant une augmentation de la positivité des tests, un rappel est fait des avis précédents. Il indique notamment que le 30 Avril, le HCSP disait que le port du masque "peut être même dangereux pour les plus petits (étouffement)".

Il tient compte de divers éléments dont des constats de la Société Française de Pédiatrie qui dit entre autres que « l’enfant, et en particulier l’enfant de moins de 10 ans, ne contribue pas significativement à la transmission de SARS-CoV2 ». Les membres de cette société ont été auditionnés.

Remarque :

La justification de cette dernière affirmation repose sur l’étude déjà citée du NCIRS en Australie, qui n’a jamais connu un nombre de cas très important mais dont le cluster le plus large s’est tout de même produit dans un lycée (102 cas)… et un autre cluster conséquent a été documenté dans une école primaire.

Elle repose également sur le suivi des premiers cas en Corée du Sud (Park et al.) qui affirme par exemple “We also found the highest COVID-19 rate (18.6% [95% CI 14.0%–24.0%]) for household contacts of school-aged children” et “young children may show higher attack rates when the school closure ends, contributing to community transmission of COVID-19”. En effet, durant le confinement, évidemment, le taux de transmission des enfants en bas âge était le plus faible…

Enfin elle cite une étude sur le déconfinement à Rhode Island où très peu de cas ont été détectés (52 pour 18 945 enfants), mais où seuls les cas symptomatiques étaient testés. Il est intéressant tout de même de noter qu’à l’échelle de l’Etat, les nouveaux cas étaient proches de 60 pour 100 000 habitants fin Juillet dans la population générale. A ce moment, il y avait 20 nouveaux cas pour les 18 945 enfants, soit une incidence plus forte que dans la population générale. Très peu de transmissions secondaires ont été identifiées, mais serait-ce du au fait qu’on n’a testé que les symptomatiques ?

Le HCSP établit des recommandations sur cette base pour les Etablissements d’Accueil des Jeunes Enfants :

- un référent COVID-19 par établissement

- communication avec les familles

- mesures barrières entre adultes

- hygiène des mains

- environnement des locaux (ventilation, linge…)

- hygiène des jouets et doudous

- règles de circulation pour adultes

- personnels symptomatiques à domicile

- critères de fermeture définis avec autorités compétentes

- masque à fenêtre transparente couvrant bouche nez et menton

- masques pour assistantes maternelles pris en charge par les collectivités

- même stratégie pour les structures d’aide sociale que pour les crèches

- mise en place d’études sur l’impact du port du masque par les adultes

- port du masque par les familles, mais pas par les enfants

- dérogation au port du masque adulte si enfant à comportement difficile, avec handicap etc…

- pas de port du masque avec l’enfant pour les aides sociales et les assistantes maternelles

 

IV) Avis du Haut Conseil de Santé Publique du 17 Septembre 2020

 

1) Contexte

 

Une mise à jour avec un aveu : « dans ses avis des 10 juin, 17 juin et 7 juillet 2020, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a rappelé que les charges virales sont généralement faibles chez les enfants, que la fréquence des formes graves de la COVID chez ces derniers est extrêmement faible et qu’ils sont moins transmetteurs que les adultes. La DGS précise que plusieurs publications scientifiques récentes semblent nuancer cette position et que cette question induit en effet de nombreuses conséquences opérationnelles. »

 

Le HCSP révise en recitant une bibliographie similaire sa position, notamment :

"La mesure dans laquelle les enfants contribuent à la transmission du SARS-CoV-2 reste incomplètement comprise."

« La transmission documentée entre les enfants et le personnel dans les établissements d'enseignement est limitée parce que de nombreux pays ont fermé les écoles et que les enfants sont restés en grande partie à la maison pendant les périodes de transmission intense au sein de la communauté »

 

Cependant il persiste dans son interprétation de la publication de Park « les enfants infectés de moins de 10 ans sont moins contagieux que les adultes infectés ». Elle utilise également la publication de Levinson et al. qui se base sur le Danemark (encore avec peu de cas) pour indiquer qu’il n’y a pas de danger à rouvrir les écoles…

 

2) Recommandations

 

En général :

- Révision de la définition des cas contact en lien avec Santé publique France

- responsable Covid-19 au sein de chaque établissement

- De faire respecter mesures barrières, nettoyage et ventilation/aération des locaux, gestion de la densité et le flux

- éviction si symptômes compatibles à une infection par le SARS-CoV-2

- promouvoir la réalisation d’enquêtes épidémiologiques pour mieux comprendre les déterminants chez les enfants

 

Port de masque :

- port préférentiel d’un masque grand public de catégorie 1 pour enfants > 11 ans et adultes

- l'adulte n'est pas considéré contact s'il porte un masque et qu'un enfant de moins de 11 ans est détecté positif.

 

Contact-tracing en EAJE et école primaire :

Si le cas est un adulte en interaction rapprochée/fréquente avec l’enfant et ne portait pas de masque ou si 3 enfants de fratries différentes sont positifs Covid-19 dans la même classe (définition cluster)

 

Concernant le contact-tracing au collège et au lycée :

- réaliser un contact-tracing si cas adulte encadrant sans masque, enfant proche symptomatique et sans masque ou si 3 enfants sont Covid-19 positifs (définition d’un cluster)

 

Concernant le retour d’éviction des enfants/élèves :

- retour d’un enfant Covid-19 positif après une éviction de 7 jours ET l’arrêt des signes si l’enfant était symptomatique (sans masque si <11 ans)

- retour d’un enfant après une période d’éviction correspondant à la disparition des signes cliniques banaux sans test

- ne pas prescrire de test par RT-PCR de SARS-CoV-2 au retour de l’enfant.

 

V) Le conseil scientifique (26 Octobre 2020)

 

Dans son dernier rapport, le conseil scientifique indique clairement :

« En frappant fort sans attendre, on peut espérer avoir un impact plus important sur la dynamique de l’épidémie et au final mieux protéger la population et l’économie que si on laisse la situation se dégrader avec des réponses tardives et insuffisantes. »

 

« Le Conseil Scientifique identifie 3 types de confinements :

- Le confinement généralisé à l’ensemble du territoire national avec les modalités de la première vague (type classique)

- Le confinement classique localisé à une ou plusieurs métropoles où : (i) l’incidence globale de SARS-CoV2 mais aussi l’incidence chez les personnes à risque de forme grave de COVID-19 est élevé et (ii) la proportion des lits de réanimation occupée par les patients COVID-19 est élevée ?

- Le confinement aménagé, généralisé ou localisé, à une ou plusieurs métropoles. »

 

Dans le dernier scénario seulement, les écoles restent ouvertes. Il décrit également :

 

« - Pour les lycées et les collèges : Les adolescents de 12 à 18 ans semblent avoir la même susceptibilité au virus et la même contagiosité vers leur entourage que les adultes. Ils font cependant des formes moins sévères de la maladie comparé aux adultes, avec une proportion de formes asymptomatiques autour de 50%. Le risque d’épidémie est bien documenté (France, Chili, Israël), avec une transmission vers le personnel enseignant. Les mesures de contrôle bénéficient d’un bon niveau de compréhension des élèves, mais le risque de contamination extra-scolaire est élevé.

 

- Pour les écoles primaires : les enfants âgés de 6 à 11 ans semblent moins susceptibles, et moins contagieux, comparés aux adultes. Ils font des formes bénignes de la maladie, avec une proportion de formes asymptomatiques autour de 70%. Peu d’épidémies ont été documentées, mais une transmission silencieuse du virus entre enfants a été décrite. En revanche, elle ne semble pas affecter de façon significative les enseignants, mais peut s’accompagner de transmission intrafamiliale secondaire.

 

- Pour les crèches : quelques foyers de transmission limités ont été décrits dans les crèches, sans forme sévère chez les enfants. Les personnels de crèche semblent peu touchés (enquête de séroprévalence), mais des cas de transmission intra-familiale secondaire ont été décrits. »

 

Après un rappel de l’avis du HCSP du 7 Juillet, le Conseil Scientifique explique :

 

"Les études rassurantes publiées pendant l’été 2020 sur le risque modéré d’épidémies en milieu scolaire l’étaient avant tout parce que la circulation du virus en Europe en post-confinement était faible"

 

Il indique qu’en Europe, les universités passent en enseignement à distance, les lycées et collèges sont parfois fermés, parfois à effectif réduit, parfois ouverts, et les écoles et crèches restent ouverts.

 

Le conseil scientifique recommande donc de :

« Renforcer les mesures :

- Le respect des distances physiques (effectifs diminués, notamment au collège et au lycée, avec recours à l’enseignement à distance le cas échéant)

- L’aération des locaux qui doit être organisée de façon très systématique, tout en entamant une réflexion sur des mesures alternatives type purificateurs d’air comme le préconisent les Allemands

- L’organisation des déjeuners, qui restent un moment à risque de contamination

- Le port du masque dès l’âge de 6 ans, comme préconisé en Espagne, l’Italie, ou Allemagne, lequel pourrait être d’autant plus encouragé que le masque est par ailleurs porté et que les enfants ont d’importantes capacités d’adaptation

- L’organisation de activités péri et extra-scolaires, de façon à minimiser les activités en intérieur, les trajets groupés, le temps passé dans les vestiaires, …

- La vérification de la température à l’entrée à l’école

Organiser une surveillance reposant sur les tests d’infection active (RT-PCR ou tests antigéniques) ou les tests sérologiques (personnels enseignants et élèves) est à mettre en place pour s’assurer que les établissements scolaires et universitaires ne deviennent pas un haut lieu de circulation du virus dans un contexte de suppression généralisée. »

 

VI) Le Ministère de l’Education (29 Octobre 2020)

 

Les décisions prises ont été publiées sur le site du ministère. Elles rappellent le lavage des mains, le port du masque pour tout le monde sauf les maternelles, le nettoyage des salles et ateliers plusieurs fois par jour et l’aération des locaux.

La limitation du brassage des élèves doit se faire en décalant dans le temps l’arrivée et le départ des élèves de l’établissement, en limitant les déplacements des élèves (recommandation d’attribuer une salle à chaque classe), récréations par groupes ou remplacées par des temps de pause en classe, grouper les élèves par classe dans les cantines.

Enfin des recommandations sur la formation aux gestes barrière et l’information des parents d’élèves sont faites (notamment vérification de la température avant de partir à l’école).

 

VII) Commentaires

1) Contexte

Les études citées par le HCSP et le Conseil Scientifique ont été critiquées dans ce document. Mais il convient d’ajouter des remarques générales.

Il est étonnant que les études les plus mises en avant soient celles dans des pays très peu touchés, et qu’il ait fallu attendre Octobre pour que le Conseil Scientifique remarque que la faible prévalence chez les enfants pouvait peut-être être due au confinement !

Cependant, certaines études importantes n’ont pas été citées. Commençons par un rapport du Ministère de la Santé en Israël, où la réouverture des écoles a été associée à une reprise extrêmement forte de l’épidémie. Les enfants étaient plus susceptibles d’être infectés, pouvaient être des super-contaminateurs, les clusters scolaires se répandaient dans la communauté et l’ouverture des écoles a accéléré l’épidémie. Une étude (Grijalva) parue tout récemment confirme la transmission des enfants aux familles. En Bavière, il a été montré que les enfants sont en réalité six fois plus affectés que le nombre de cas détectés dans une étude sérologique (Hippich). Une autre étude (Lopez) a montré la transmission des enfants à leur foyer. Un modèle (Li) utilisant les données de 131 pays ont montré qu’il y avait un délai d’un mois entre la réouverture des écoles et leur effet, mais que cette réouverture provoquait une augmentation de 24% de la transmission du virus.

2) Recommandations et application

Les mesures recommandées et prises dans un contexte de circulation très active du virus semblent extrêmement légères. Un ressenti général que « rien n’a changé » s’est installé chez les élèves et les enseignants. Il est vrai que la distanciation physique, les mesures d’hygiène et le port du masque étaient déjà appliqués.

La réduction du brassage des élèves paraît souvent difficilement applicable par les établissements et est la seule nouveauté, qui n’est pas imposée et donc que peu déployée.

La mise en danger des élèves est réelle, même si le risque est moindre que pour des adultes chez les enfants de moins de 10 ans. Celle des familles et des enseignants existe aussi. Améliorer la continuité pédagogique à distance devrait être un travail quotidien, il est essentiel de mieux préparer un confinement total qui paraît se rapprocher de plus en plus.

 

0 commentaires:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.