Pandémie due au virus sars-cov-2 en
milieu scolaire
I) Avis du Haut Conseil de la Santé Publique du 10 Juin 2020
1) Contexte
Après un confinement général de
la population, des recommandations ont été publiées le 24 Avril 2020 pour
accompagner le déconfinement de mesures barrières et de distanciation physique.
Celles-ci ont été complétées par un avis du Haut Conseil de la Santé Publique,
paru le
10 Juin 2020. Il est accompagné d’une lettre de Jérôme Salomon qui résume
son contenu.
Ce document se préoccupe de
l’impact de la situation d’isolement sur la santé des élèves et propose
d’assouplir certains aspects de la doctrine sanitaire applicable aux
établissements scolaires. Il affirme entre autres :
« La
Covid-19 touche essentiellement les adultes » : affirmation sourcée par deux études portant
sur le début de l’épidémie en Chine, publiées très tôt (Mars/Avril),
La première (Dong et al.) disant clairement le
contraire : “Although clinical manifestations of children’s
COVID-19 cases were generally less severe than those of adult patients, young
children, particularly infants, were vulnerable to infection.”
La seconde (Liu et al.) indiquant également le
contraire : “This study showed that Covid-19 occurred in children, causing moderate-to-severe
respiratory illness, in the early phase of the SARS-CoV-2 outbreak in Wuhan and
was associated with ICU admission in one patient.” et “Our findings indicate
that SARS-CoV-2 infections in children were occurring early in the epidemic.”
« Les
enfants se sont révélés moins souvent porteurs du virus Sars-CoV-2 que l’adulte
et les données disponibles sur la contagiosité des plus jeunes lèvent de
nombreuses inquiétudes » : affirmation reposant sur quatre
études
La première
(Zhu et al.) est une étude au début de l’épidémie sur 31 familles, en preprint
sur medrxiv où il suffit de lire le commentaire pour se rendre compte du
problème :
« People are citing this study
as indicating that children do not bring the infection home, but the study only
identifies the first person showing symptoms and sign, which may be less
apparent in children. Circular argument. »
Les auteurs ont répondu :
« Hi Joanna, we were also
concerned that this about this possibility and you will see that we addressed
this in the results section of the article. Thanks
for your comment »
La seconde étude (Munro et al.) n’est
en fait qu’une revue incluant ce premier papier et certains autres très peu
significatifs (faibles échantillons) ou encore fortement critiqués.
La troisième étude (Gudbjartsson
et al.) est une analyse faite dans la population Islandaise. Celle-ci dit,
après avoir proposé des tests au hasard dans la population :
« In a population-based study in
Iceland, children under 10 years of age and females had a lower incidence of
SARS-CoV-2 infection than adolescents or adults and males. »
Cette étude indique un taux de
positivité croissant avec l’âge, lorsque la population est prise au hasard. On
note toutefois qu’à partir de 10 ans, le taux de positivité monte
drastiquement. Elle a été sévèrement
critiquée car la situation Islandaise est particulière. En réalité, le
premier cas était d’une certaine tranche d’âge et a transmis dans sa classe
d’âge, provoquant une distribution initiale de la maladie non équilibrée. Plus
tard, avec le confinement, les enfants étaient moins à risque également d’être
infectés. La distribution serait donc davantage due à la distribution initiale
du premier cluster qu’à un rôle moins important de la transmission chez les
enfants… D’ailleurs l’intention même de cette publication n’était pas d’étudier
la transmission chez les enfants.
La quatrième étude
(Danis et al.) étudie un cluster précis et s’intéresse au fait qu’un unique
enfant asymptomatique n’aie pas transmis le virus. Cette étude tire des
conclusions par rapport à cet unique enfant, ce qui est tout de même très
limité statistiquement.
Le document décrit enfin plus en
détail une
étude (Cohen et al., également critiquée
notamment parce que les tests PCR sur les enfants sont souvent négatifs en swab nasal
et positifs dans les selles) montrant que sur 603 enfants, très peu
d’enfants ont eu une RT-PCR positive (1,8%) mais un grand nombre a eu une
sérologie positive (10%). Une seconde étude
(Levy et al., ayant eu un score automatisé d’analyse de rigueur scientifique de
0/5) est également décrite, analysant 52588 tests réalisés entre le 2 Mars et
le 24 Avril 2020, et dans laquelle la positivité des enfants (5,9%) était bien
plus faible que celle des adultes (20,3%).
S’appuyant sur ces études, il est
affirmé que « les enfants seraient de très
faibles agents contaminateurs mais qu’ils auraient plutôt été infectés par
leurs proches (parents) en phase de confinement » et « la différence des taux de positivité et la rareté des
contaminations à l’école plaident pour un rôle faible des enfants dans la
dynamique de l’épidémie et pour une contagion dans le sens adultes
enfants ».
D’une part, les enfants étant
plus souvent asymptomatiques, ils ont très probablement été moins testés que
les adultes, d’où une moins bonne détection des cas de contamination en milieu
scolaire et le taux plus faible de RT-PCR positive que de sérologie positive
(indiquant que l’enfant a porté le virus par le passé mais n’avait pas été
détecté). D’autre part, les enfants étant souvent asymptomatiques, il est
évident que la positivité sur des tests réalisés souvent suite à l’apparition
de symptômes sera plus importante chez les adultes.
Le document oppose à ces
observations l’incidence des violences
domestiques et la nécessité du retour à l’école selon les
sociétés françaises de pédiatrie, y compris ceux porteurs
d’un handicap, indiquant également les inconvénients soulevés par l’UNESCO
(interruption de l’apprentissage, difficultés de l’alimentation, difficulté
pour les parents à encadrer le travail scolaire, insuffisance d’accès aux
technologies).
La réouverture de 85%
des établissements après le confinement de Mars ne s’est accompagnée d’un
retour à l’école que de 22%
des élèves.
2) Recommandations
En général :
- Communication (parents d'élèves et personnels)
- Hygiène des mains (HDM) fréquente et port de masque (modalités de
rangement sécurisé avec protocole défini (repli sans contacts extérieur/intérieur,
pochette individuelle, accroche isolée…)
- Actions pédagogiques relatives aux mesures d’hygiène individuelle et
collective
- Disposer et renouveler des fournitures adéquates (savon, lingettes
etc)
- La priorité doit être donnée aux enfants « vulnérables » si
impossibilité d'accueillir tous les élèves
Distanciation :
- Accompagnement des élèves devant l’établissement organisé
- Distance physique d’au moins 1 mètre doit être respectée dans les
classes entre le bureau de l’enseignant et les élèves et entre les élèves en
position côte à côte (« latéralement ») ou en face à face.
- Ceci ne s'applique pas en extérieur, mais il convient alors de
veiller à ne pas mélanger dans le temps les groupes constitués comme les
différentes classes entre elles
- Jeux autorisés à condition de nettoyer
- Dans les pauses et activités périscolaires, éviter les regroupements
d’élèves de différentes classes
Hygiène :
- vigilance sur l'hygiène des mains (lavage 30 secondes de préférence
eau et savon)
- mise à disposition de savon et de lavabos
Restauration :
- privilégier la cantine
- distance d'un mètre
- nettoyage de fours à micro-ondes collectifs
- nettoyage sols et surfaces une fois par jour minimum
Environnement :
- aération 10 et 15 min le matin avant l’arrivée des élèves, à chaque
intercours, au moment du déjeuner et le soir pendant le nettoyage des locaux
- vérifier le fonctionnement VMC
- pas de ventilateur dirigé vers les élèves
- Hygiène des toilettes avec papier, savon, poubelles etc…
- Objets partagés (ballon, crayons…) doivent être nettoyés au minimum
une fois par jour
Personnels réalisant l’entretien :
- gants, lavés ou jetés après usage
- lavage au savon une fois les gants retirés
- lavage des vêtements après opération effectuée
Traitement des cas :
- Rester à domicile si symptômes compatibles
- Prise de température le matin en cas de symptômes ou de sensation de
fièvre
- Evénements et rassemblements autorisés avec port du masque
- Repérage des élèves avec symptômes
- Accompagner l’élève à l’infirmerie en cas de signes cliniques
- Suivi de cas contact si un cas positif est détecté, avec possibilité
de fermer l’établissement à l’appréciation des autorités compétentes
II) Avis du Haut Conseil de la Santé Publique du 7 Juillet 2020
1) Contexte
Pour préparer la rentrée 2020, dans un contexte d’assouplissement
général, un nouvel avis a été donné par le HCSP le 7 Juillet
2020. Ce document est plus riche en références que celui du 10 Juin 2020,
mais utilise certaines de ses références. Les références sont séparées par
thématiques.
A) Susceptibilité des enfants
Dépistages de cas secondaires, enfants moins souvent positifs que les
adultes :
- Wang
et al. : qui dit clairement que des tests sérologiques n’ont pas été
effectués et qu’il est donc impossible de conclure quant à la plus faible
infectivité des enfants :
“People of all ages
seem to be susceptible to SARS-CoV-2. [...]Based on the available evidence,
without the results of serological studies, it is hard to tell if children are
not susceptible.”
- Li et
al. : Les 392 contacts de 105 patients ont été testés, et on a retrouvé une
plus grande positivité chez les adultes (17,1%) que chez les enfants (4%), mais
les auteurs tempèrent ce résultat en précisant qu’il existe des facteurs
confondants comme les comportements :
“However, the real
causes leading to the different secondary attack rates between adult and
children needed to be more explored and many factors could influence the secondary
transmission of epidemic diseases in household, such as behaviors of contacts
and occupations of members”
- Zhang
et al. : Dans cette étude, c’est le rapport entre nombre de cas positifs et
nombre de contacts qui est estimé, et elle montre clairement que le nombre de
contacts est extrêmement élevé pour les plus jeunes. Les périodes de vacances
scolaires réduisent drastiquement les cas d’infection. Cependant, rapporté au
nombre de contacts, les enfants sont moins susceptibles de développer la
maladie. Est-ce que l’augmentation des contacts est un facteur
confondant ? Quid des adultes qui auraient un nombre de contacts aussi
élevé que les enfants à l’école ?
- Jing
et al. : Les premiers cas en Chine ont été étudiés, il s’agit
principalement de cas symptomatiques, la plupart étant des adultes et 5% étant
des enfants, mais on ne peut en tirer de conclusions quant à la susceptibilité
des enfants, justement parce qu’on a très peu d’asymptomatiques, et qu’on n’a
aucune idée de la configuration de la population totale testée.
- Cheng
et al. : étude sur des cas contacts à Taïwan. Il est intéressant de
noter qu’ici, la variable employée est appelée « attack rate »,
risque d’infection secondaire. Les résultats ne sont pas significativement
différents entre les classes d’âge, les intervalles de confiance se chevauchant
pour toutes les classes d’âge (moins de 20 ans de 0 à 1,4 ; les 20-39 ans
de 0,2 à 1,1 ; les 40-59 ans de 0,6 à 2,1 et les plus de 60 ans de 0,3 à
2,6). Cette étude va à l’encontre d’une susceptibilité plus forte chez les
enfants, malgré sa faiblesse statistique (petit échantillon).
Sérologie moindre chez les enfants que chez les adultes en population
générale :
- Mizumoto
et al. : des cohortes symptomatiques, sans compter les asymptomatiques
donc, montrent un plus fort taux d’infection chez les enfants que chez les
adultes…
- Lavezzo
et al. : la ville de Vo’, où le premier cas Italien de COVID19 a été
détecté, a été confinée et l’ensemble de la population a été testée. Sur les 73
cas positifs découverts, aucun enfant de 0 à 10 ans mais une prévalence de 1,2%
pour les 11-20 ans, de 1,7% pour les 21-30 ans, de 2,4% pour les 31-40 ans, de
1,1% pour les 41-50 ans, de 3,2% pour les 51-60 ans, de 3,9% pour les
61-70 ans, de 6% pour les 71-80 ans et de 2,2% pour les plus de 80 ans. Comme
il n’y a pas eu de tests sérologiques, on ne peut pas savoir si des enfants
avaient été infectés avant.
- Marina
Pollan et al. : Dans cette étude assez large menée en Espagne, des foyers
ont été testés au hasard pour vérifier la prévalence de la positivité en
sérologie, les résultats sont présentés dans le tableau suivant :
Cette étude présente également de grandes différences entre les
personnes actives ayant maintenu un emploi et les personnes sans emploi,
puisqu’elle a couvert la période du confinement. On peut donc raisonnablement
penser que les enfants, qui n’ont pas de différence significative avec les
classes d’âge de 20 à 34 ans ou de 35 à 49 ans, sont davantage assimilables à
la partie de ces personnes n’ayant pas d’emploi en période de confinement
(prévalence de 3,5%).
- le RIVM :
qui indique que les enfants de tous âges sont susceptibles de contracter le
virus. 1,1% des 100 000 enfants testés étaient positifs contre 2% de la
population générale (940 000). La contamination se fait principalement de
tranche d’âge à tranche d’âge identique, les plus contaminants dans leurs
tranches d’âge étant les 20-24 ans suivis des 15-19 ans et des 25-29 ans.
Sérologie identique chez les enfants et chez les adultes en population
générale :
- La
Swedish Public Health Agency : 738 participants avec un taux de positivité
maximal chez les 0-15 ans (2,8%) mais sans différence significative avec les
autres tranches d’âge (allant de 2 à 2,6%).
- L’Office
statistique de Londres : page 1h du document indiquant un taux de
positivité comparable pour toutes les tranches d’âge, le plus élevé étant dans la
classe de 16 à 24 ans.
- Streek et
al. : une étude sur 919 individus avec une positivité en sérologie
similaire dans toutes les classes d’âge.
- Stringhini
et al. : 2766 participants après la première vague en Suisse avec une
sérologie proche dans toutes les classes d’âge sauf pour les moins de 10 ans.
Sont également re-cités Gubjartsson et al. et Lévy et al. déjà discutés
précédemment.
B) Fréquence des formes graves chez les enfants
- Bialek
et al. : les symptômes semblent moins prononcés chez les 2572 enfants
positifs sur un total de 149760 cas détectés.
- Lu et
al. : symptômes moins prononcés d’après les données Chinoises sur 171
enfants positifs
- Qiu
et al. : symptômes modérés chez 36 enfants en Chine
- Tagarro
et al. : 25 enfants hospitalisés sur 41 positifs parmi 365 testés en deux
semaines en Espagne. Quatre ont été transférés en soins intensifs avec
assistance respiratoire. Les tests étaient réservés aux personnes
symptomatiques en hôpital face au grand nombre de cas, ce qui a pu biaiser les
résultats vers une sévérité accrue.
- Parri et
al. : sur 100 enfants positifs, 9 ont eu besoin d’assistance respiratoire.
- Parri
et al. : sur 130 enfants positifs, 11 en état sévère et 9 en état critique.
- Morand
et al. : un preprint de l’IHU Méditerranée avec Didier Raoult, dont on peut
mettre en doute les PCR. Cependant, on peut sans doute faire confiance aux
données cliniques, sur 130 enfants, 21 ont été admis en hôpital immédiatement,
10 ont été hospitalisés par la suite et un seul a été admis en soins intensifs.
La conclusion, en phrase finale du papier, cite Zhu de façon erronée, comme
indiqué précédemment, comme une preuve selon laquelle les enfants ne
contamineraient pas les familles.
- de
Souza et al. : une méta-analyse de 38 études avec 1124 cas identifiés chez
des enfants avec 2,1% de cas sévères et 1,2% de cas critiques. Des limitations
sont indiquées (certains cas ont pu être cités par diverses études et donc
comptés en double notamment).
- Ludvigsson :
une méta-analyse de 45 études avec une mortalité extrêmement rare et des
symptômes moins sévères que chez l’adulte dans l’ensemble.
- Oualha
et al. : sur 27 enfants ayant des cas graves
Sont également recités Dong et al. et Liu et al., déjà discutés
précédemment.
C) Les enfants seraient moins transmetteurs que les adultes
- NCIRS :
dans les écoles, seuls 2 cas positifs ont été détectés sur 863 contacts par PCR.
Cette étude a été affinée ensuite, avec un total de 1448 contacts dont 633 ont
été testés, avec 18
cas détectés, soit par PCR soit par sérologie. Tous n’ont pas été testés
par les deux techniques.
- Fontanet
et al. : 326 élèves, enseignants et personnels d’un lycée de l’Oise
ainsi que 346 membres de leurs familles ont participé à cette étude. 171
avaient des anticorps, neuf ont été hospitalisés. Le lycée avait un taux
d’attaque d’infection de 40,9% alors que la famille n’était qu’à 10,9%. En
moyenne, c’est un taux de 25,9% qui a été calculé. Comparé au taux présent chez
les donneurs de sang alentours, qui est de 3%, c’est très élevé. Mais Les auteurs
ont considéré que le chiffre était faible compte tenu du fait que le lycée se
trouve au centre de l’épidémie française.
- Fontanet
et al. 2 : Dans la même période, dans les écoles primaires au même endroit,
45 élèves sur 510 (8,8%) étaient positifs contre 3 enseignants sur 42 (7,1%), 1
personnel sur 28 (3,6%), 76 parents sur 641 (11,9%) et 14 proches sur 119
(11,8%). Lorsque les enfants étaient positifs, 61% des parents et 44% des
fratries étaient positifs aussi, alors que seuls 6,9% des parents et 11,8% des
fratries l’étaient avec des enfants négatifs.
- Jones et
al. : la charge virale est évaluée chez différentes classes d’âge et se
trouve être constante quel que soit l’âge.
- Colson
et al. : étude très
critiquée qui indiquerait que les enfants ne jouent pas un rôle dans
l’épidémie car auraient moins souvent une charge virale élevée…
Sont également cités Munro et al. et Danis et al. déjà décrits
précédemment.
2) Recommandations
Un assouplissement est proposé pour la rentrée :
- La distanciation physique qui n’est plus indispensable.
- La gestion du flux de circulation dans l’établissement est levée.
- Il est demandé d’anticiper pour être en mesure d’assurer la
continuité pédagogique si l’épidémie reprend en Automne.
- Le transport scolaire n’est plus soumis à la distanciation physique.
- Les masques sont obligatoires pour les enfants même en maternelle et
en primaire.
III) Avis du Haut Conseil de la Santé Publique du 9 Septembre 2020
Cet avis concerne le port du
masque dans les structures accueillant des enfants de 0 à 3 ans. Après un
rappel du contexte, notamment épidémiologique indiquant une augmentation de la
positivité des tests, un rappel est fait des avis précédents. Il indique
notamment que le 30 Avril, le HCSP disait que le port du masque "peut être
même dangereux pour les plus petits (étouffement)".
Il tient compte de divers
éléments dont des constats de la Société Française de Pédiatrie qui dit
entre autres que « l’enfant, et en particulier l’enfant de moins de 10 ans,
ne contribue pas significativement à la transmission de SARS-CoV2 ». Les
membres de cette société ont été auditionnés.
Remarque :
La justification de cette dernière
affirmation repose sur l’étude déjà citée du NCIRS en Australie, qui n’a jamais
connu un nombre de cas très important mais dont le cluster le plus large s’est
tout de même produit dans un lycée (102 cas)… et un autre
cluster conséquent a été documenté dans une école primaire.
Elle repose également sur le suivi
des premiers cas en Corée du Sud (Park et al.) qui affirme par exemple “We also found the highest
COVID-19 rate (18.6% [95% CI 14.0%–24.0%]) for household contacts of
school-aged children” et “young children may show higher attack rates when the
school closure ends, contributing to community transmission of COVID-19”. En effet,
durant le confinement, évidemment, le taux de transmission des enfants en bas
âge était le plus faible…
Enfin elle cite une étude sur le
déconfinement à Rhode Island où très peu de
cas ont été détectés (52 pour 18 945 enfants), mais où seuls les cas
symptomatiques étaient testés. Il est intéressant tout de même de noter qu’à
l’échelle de l’Etat, les nouveaux cas étaient proches de 60 pour 100 000
habitants fin Juillet dans la population générale. A ce moment, il y avait 20
nouveaux cas pour les 18 945 enfants, soit une incidence plus forte que
dans la population générale. Très peu de transmissions secondaires ont été
identifiées, mais serait-ce du au fait qu’on n’a testé que les
symptomatiques ?
Le HCSP établit des recommandations sur cette base pour les
Etablissements d’Accueil des Jeunes Enfants :
- un référent COVID-19 par établissement
- communication avec les familles
- mesures barrières entre adultes
- hygiène des mains
- environnement des locaux (ventilation, linge…)
- hygiène des jouets et doudous
- règles de circulation pour adultes
- personnels symptomatiques à domicile
- critères de fermeture définis avec autorités compétentes
- masque à fenêtre transparente couvrant bouche nez et menton
- masques pour assistantes maternelles pris en charge par les
collectivités
- même stratégie pour les structures d’aide sociale que pour les
crèches
- mise en place d’études sur l’impact du port du masque par les adultes
- port du masque par les familles, mais pas par les enfants
- dérogation au port du masque adulte si enfant à comportement
difficile, avec handicap etc…
- pas de port du masque avec l’enfant pour les aides sociales et les
assistantes maternelles
IV) Avis du Haut Conseil de Santé Publique du 17 Septembre 2020
1) Contexte
Une mise à jour avec un aveu : « dans
ses avis des 10 juin, 17 juin et 7 juillet 2020, le Haut Conseil de la santé
publique (HCSP) a rappelé que les charges virales sont généralement faibles
chez les enfants, que la fréquence des formes graves de la COVID chez ces
derniers est extrêmement faible et qu’ils sont moins transmetteurs que les adultes.
La DGS précise que plusieurs publications scientifiques récentes semblent
nuancer cette position et que cette question induit en effet de nombreuses
conséquences opérationnelles. »
Le HCSP révise en recitant une bibliographie similaire sa position, notamment :
"La mesure dans laquelle les enfants
contribuent à la transmission du SARS-CoV-2 reste incomplètement
comprise."
« La transmission documentée entre les
enfants et le personnel dans les établissements d'enseignement est limitée
parce que de nombreux pays ont fermé les écoles et que les enfants sont restés
en grande partie à la maison pendant les périodes de transmission intense au
sein de la communauté »
Cependant il persiste dans son interprétation de la publication de Park
« les enfants infectés de moins de 10 ans sont moins contagieux que les
adultes infectés ». Elle utilise également la publication de Levinson
et al. qui se base sur le Danemark (encore avec peu de cas) pour indiquer
qu’il n’y a pas de danger à rouvrir les écoles…
2) Recommandations
En général :
- Révision de la définition des cas contact en lien avec Santé publique
France
- responsable Covid-19 au sein de chaque établissement
- De faire respecter mesures barrières, nettoyage et
ventilation/aération des locaux, gestion de la densité et le flux
- éviction si symptômes compatibles à une infection par le SARS-CoV-2
- promouvoir la réalisation d’enquêtes épidémiologiques pour mieux
comprendre les déterminants chez les enfants
Port de masque :
- port préférentiel d’un masque grand public de catégorie 1 pour
enfants > 11 ans et adultes
- l'adulte n'est pas considéré contact s'il porte un masque et qu'un
enfant de moins de 11 ans est détecté positif.
Contact-tracing en EAJE et école primaire :
Si le cas est un adulte en interaction rapprochée/fréquente avec
l’enfant et ne portait pas de masque ou si 3 enfants de fratries différentes
sont positifs Covid-19 dans la même classe (définition cluster)
Concernant le contact-tracing au collège et au lycée :
- réaliser un contact-tracing si cas adulte encadrant sans masque,
enfant proche symptomatique et sans masque ou si 3 enfants sont Covid-19
positifs (définition d’un cluster)
Concernant le retour d’éviction des enfants/élèves :
- retour d’un enfant Covid-19 positif après une éviction de 7 jours ET
l’arrêt des signes si l’enfant était symptomatique (sans masque si <11 ans)
- retour d’un enfant après une période d’éviction correspondant à la
disparition des signes cliniques banaux sans test
- ne pas prescrire de test par RT-PCR de SARS-CoV-2 au retour de
l’enfant.
V) Le conseil scientifique (26 Octobre 2020)
Dans son dernier
rapport, le conseil scientifique indique clairement :
« En frappant fort sans attendre, on
peut espérer avoir un impact plus important sur la dynamique de l’épidémie et
au final mieux protéger la population et l’économie que si on laisse la
situation se dégrader avec des réponses tardives et insuffisantes. »
« Le Conseil Scientifique identifie 3
types de confinements :
- Le confinement généralisé à l’ensemble du
territoire national avec les modalités de la première vague (type classique)
- Le confinement classique localisé à une ou
plusieurs métropoles où : (i) l’incidence globale de SARS-CoV2 mais aussi
l’incidence chez les personnes à risque de forme grave de COVID-19 est élevé et
(ii) la proportion des lits de réanimation occupée par les patients COVID-19
est élevée ?
- Le confinement aménagé, généralisé ou
localisé, à une ou plusieurs métropoles. »
Dans le dernier scénario seulement, les écoles restent ouvertes. Il
décrit également :
« - Pour les lycées et les collèges :
Les adolescents de 12 à 18 ans semblent avoir la même susceptibilité au virus
et la même contagiosité vers leur entourage que les adultes. Ils font cependant
des formes moins sévères de la maladie comparé aux adultes, avec une proportion
de formes asymptomatiques autour de 50%. Le risque d’épidémie est bien
documenté (France, Chili, Israël), avec une transmission vers le personnel
enseignant. Les mesures de contrôle bénéficient d’un bon niveau de
compréhension des élèves, mais le risque de contamination extra-scolaire est
élevé.
- Pour les écoles primaires : les enfants
âgés de 6 à 11 ans semblent moins susceptibles, et moins contagieux, comparés
aux adultes. Ils font des formes bénignes de la maladie, avec une proportion de
formes asymptomatiques autour de 70%. Peu d’épidémies ont été documentées, mais
une transmission silencieuse du virus entre enfants a été décrite. En revanche,
elle ne semble pas affecter de façon significative les enseignants, mais peut
s’accompagner de transmission intrafamiliale secondaire.
- Pour les crèches : quelques foyers de
transmission limités ont été décrits dans les crèches, sans forme sévère chez
les enfants. Les personnels de crèche semblent peu touchés (enquête de
séroprévalence), mais des cas de transmission intra-familiale secondaire ont
été décrits. »
Après un rappel de l’avis du HCSP du 7 Juillet, le Conseil Scientifique
explique :
"Les études rassurantes publiées
pendant l’été 2020 sur le risque modéré d’épidémies en milieu scolaire
l’étaient avant tout parce que la circulation du virus en Europe en
post-confinement était faible"
Il indique qu’en Europe, les universités passent en enseignement à
distance, les lycées et collèges sont parfois fermés, parfois à effectif
réduit, parfois ouverts, et les écoles et crèches restent ouverts.
Le conseil scientifique recommande donc de :
« Renforcer les mesures :
- Le respect des distances physiques
(effectifs diminués, notamment au collège et au lycée, avec recours à
l’enseignement à distance le cas échéant)
- L’aération des locaux qui doit être
organisée de façon très systématique, tout en entamant une réflexion sur des
mesures alternatives type purificateurs d’air comme le préconisent les Allemands
- L’organisation des déjeuners, qui restent
un moment à risque de contamination
- Le port du masque dès l’âge de 6 ans,
comme préconisé en Espagne, l’Italie, ou Allemagne, lequel pourrait être
d’autant plus encouragé que le masque est par ailleurs porté et que les enfants
ont d’importantes capacités d’adaptation
- L’organisation de activités péri et
extra-scolaires, de façon à minimiser les activités en intérieur, les trajets
groupés, le temps passé dans les vestiaires, …
- La vérification de la température à
l’entrée à l’école
Organiser une surveillance reposant sur les
tests d’infection active (RT-PCR ou tests antigéniques) ou les tests
sérologiques (personnels enseignants et élèves) est à mettre en place pour
s’assurer que les établissements scolaires et universitaires ne deviennent pas
un haut lieu de circulation du virus dans un contexte de suppression
généralisée. »
VI) Le Ministère de l’Education (29 Octobre 2020)
Les décisions
prises ont été publiées sur le site du ministère. Elles rappellent le
lavage des mains, le port du masque pour tout le monde sauf les maternelles, le
nettoyage des salles et ateliers plusieurs fois par jour et l’aération des
locaux.
La limitation du brassage des
élèves doit se faire en décalant dans le temps l’arrivée et le départ des
élèves de l’établissement, en limitant les déplacements des élèves
(recommandation d’attribuer une salle à chaque classe), récréations par groupes
ou remplacées par des temps de pause en classe, grouper les élèves par classe
dans les cantines.
Enfin des recommandations sur la
formation aux gestes barrière et l’information des parents d’élèves sont faites
(notamment vérification de la température avant de partir à l’école).
VII) Commentaires
1) Contexte
Les études citées par le HCSP et
le Conseil Scientifique ont été critiquées dans ce document. Mais il convient
d’ajouter des remarques générales.
Il est étonnant que les études
les plus mises en avant soient celles dans des pays très peu touchés, et qu’il
ait fallu attendre Octobre pour que le Conseil Scientifique remarque que la
faible prévalence chez les enfants pouvait peut-être être due au confinement !
Cependant, certaines études
importantes n’ont pas été citées. Commençons par un rapport du Ministère
de la Santé en Israël, où la réouverture des écoles a été associée à une
reprise extrêmement forte de l’épidémie. Les enfants étaient plus susceptibles
d’être infectés, pouvaient être des super-contaminateurs, les clusters
scolaires se répandaient dans la communauté et l’ouverture des écoles a accéléré
l’épidémie. Une étude
(Grijalva) parue tout récemment confirme la transmission des enfants aux
familles. En Bavière, il a été montré que les enfants sont en réalité six fois
plus affectés que le nombre de cas détectés dans une étude sérologique
(Hippich). Une autre étude
(Lopez) a montré la transmission des enfants à leur foyer. Un modèle
(Li) utilisant les données de 131 pays ont montré qu’il y avait un délai d’un
mois entre la réouverture des écoles et leur effet, mais que cette réouverture
provoquait une augmentation de 24% de la transmission du virus.
2) Recommandations et application
Les mesures recommandées et
prises dans un contexte de circulation très active du virus semblent
extrêmement légères. Un ressenti général que « rien n’a changé »
s’est installé chez les élèves et les enseignants. Il est vrai que la
distanciation physique, les mesures d’hygiène et le port du masque étaient déjà
appliqués.
La réduction du brassage des
élèves paraît souvent difficilement applicable par les établissements et est la
seule nouveauté, qui n’est pas imposée et donc que peu déployée.
La mise en danger des élèves est
réelle, même si le risque est moindre que pour des adultes chez les enfants de
moins de 10 ans. Celle des familles et des enseignants existe aussi. Améliorer
la continuité pédagogique à distance devrait être un travail quotidien, il est
essentiel de mieux préparer un confinement total qui paraît se rapprocher de
plus en plus.
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